Au cœur d’une boucle de la Rance, à Guitté (22), se niche un élevage porcin emblématique du savoir-faire breton en matière de sélection et de multiplication. Un outil de pointe qui permet à Laurent Dartois d’exporter ses cochons vers une dizaine de pays étrangers. Visite guidée.
Il y a quelques jours, une équipe chinoise était sur l’exploitation. Cet après-midi, c’est le gouverneur de l’État de Lagos, région administrative du sud-ouest du Nigéria, qui est attendu à Guitté. « Nous accueillons, en moyenne, une délégation étrangère par semaine », souligne Laurent Dartois. Une ouverture à l’international qu’il cultive. Au mur de la pièce qui jouxte son bureau, une carte du monde est affichée. Et, dans le même esprit, il a choisi un nom à consonance anglophone pour son élevage : LWD Genetics. « LW, c’est pour Large white et LD pour Landrace, les deux races de porcs présentes sur l’élevage. L et D, ce sont aussi mes initiales, comme quoi je devais être destiné à devenir éleveur de porcs… » L’atavisme a dû jouer aussi un peu. Son père, Guy, a notamment présidé durant neuf ans la Cooperl, le leader français de la production porcine.
Depuis qu’il a repris l’exploitation familiale en 2000, Laurent a sérieusement agrandi son outil de travail. « Mes proches me disent parfois que je suis boulimique de projets », reconnaît ce quadragénaire à l’enthousiasme communicatif. Les 250 truies des premières années semblent désormais bien loin. « Nous nous sommes développés au fil du temps. Aujourd’hui, nous comptons 850 truies. Pour un tiers en sélection, pour deux tiers en multiplication. Cela représente environ 30 000 porcs produits par an ». Les trois quarts de ces cochons sont commercialisés en Label Rouge, via un partenariat avec Kermené, tandis que 7 000 à 8 000 cochettes sont vendues chaque année à l’export. « Cela demande plus de travail, mais la plus-value est meilleure ». Destinations les plus fréquentes : Chine, Vietnam, Corée, Thaïlande, Philippines, Espagne…
En quête de qualité
Pour être dans la course à l’export, l’exploitation se doit, bien évidemment, d’être irréprochable sur le plan sanitaire. Laurent Dartois, lui, a fait le choix de l’air filtré pour ses équipements. Une technologie issue du milieu hospitalier et que son père fut le premier à adapter à l’élevage porcin. « L’air entrant passe à travers une série de filtres qui piègent les poussières ainsi que les virus aéroportés. Ensuite, l’air est géré en surpression dans les bâtiments de manière à ce que les contaminants ne puissent entrer ». Une technique de pointe qui lui permet de se distinguer. « Sur les quatre ou cinq élevages en Europe capables de répondre aux gros appels d’offres de peuplement, nous ne sommes que deux à fonctionner en air filtré ! »
Pour vendre ses cochons dans des pays où la technicité des éleveurs n’est pas comparable à celle qui peut exister en France, Laurent Dartois veille, au-delà de la seule génétique, à sélectionner des animaux qui soient « autonomes », avec un comportement facile. « Bien sûr, la prolificité est un critère important. Mais il y a une limite physiologique. Il faut également prendre en compte la capacité de la truie à bien sevrer ses porcelets, l’homogénéité du lot… »
Autant de paramètres qui faciliteront ensuite la tâche des éleveurs et auxquels lui et ses neuf salariés portent une attention toute particulière. Ici, rien n’est laissé au hasard. Un souci du détail qui s’exprime des abords de l’élevage, parfaitement entretenus, jusqu’au camion de transport et aux bleus de travail, décorés du sigle LWD sur fond de drapeau breton. « Nous pratiquons un métier dont nous sommes tous fiers ! »
[caption id= »attachment_31183″ align= »aligncenter » width= »720″] Chaque année, 7 000 à 8 000 cochettes sont commercialisées à l’export.[/caption]
Tourné vers l’avenir
Une image de professionnalisme qui a valu à l’élevage Dartois d’être retenu par Bretagne Filières comme référence pour le porc. Cette association met à profit l’expertise de la première région agroalimentaire d’Europe pour accompagner les porteurs de projets en Afrique. Un continent qui offre de réelles perspectives de développement aux yeux de Laurent Dartois. « C’est un travail de longue haleine, mais j’y crois beaucoup. Nous sommes en train de conclure avec notre premier client au Nigéria. Et bientôt, ce sera la Côte d’Ivoire… C’est une belle vitrine pour mes partenaires, Axiom (génétique) et I-Tek (bâtiment) ».
Tourné vers l’avenir, l’éleveur costarmoricain vient de se faire construire, avec le concours financier du Crédit Mutuel de Bretagne, un nouvel équipement sur la commune voisine de Saint-Maden, qui abrite la seconde implantation de l’exploitation. Un bâtiment d’engraissement de 2 100 places avec raclage, séparation de phase pour les effluents, centrales de filtration et puits canadien pour l’air. Lumineuses, les salles équipées de caillebotis sont dotées, sur les murs et les plafonds, d’un revêtement qui peut être lavé au nettoyeur haute pression. À la clé : gain de temps et économie d’eau.
[caption id= »attachment_31184″ align= »aligncenter » width= »720″] Dans le nouveau bâtiment d’engraissement, les salles sont équipées sur les murs et les plafonds d’un revêtement qui peut être lavé au nettoyeur haute pression.[/caption]
Début novembre, la journée « porte ouverte » organisée sur le site a drainé plusieurs centaines de visiteurs venus découvrir ce qui se fait de mieux en la matière. Et la semaine passée, les premiers porcelets issus de la multiplication ont pris possession des lieux. « D’ici quelques mois, nous aurons atteint notre rythme de croisière. Avec cet outil de travail, je suis allé au bout de mes convictions ». Le « boulimique » est enfin rassasié. Pour quelque temps au moins.
[caption id= »attachment_31177″ align= »alignright » width= »155″] Maxime Le Grand, chargé de clientèle agricole, pôle d’expertise CMB de Broons.[/caption]
Innovation et professionnalisme
Laurent Dartois gère son exploitation avec rigueur et professionnalisme. Il a investi régulièrement ces dernières années afin de disposer d’un outil innovant, fonctionnel et parfaitement adapté à ses marchés, notamment à l’export. C’est un secteur exigeant, qui oblige certes à l’excellence, mais offre aussi en contrepartie une meilleure valorisation de la production. En tant que partenaire bancaire, accompagner des projets de ce type, c’est stimulant. Et il y a une vraie fierté à avoir ici dans les Côtes d’Armor un élevage qui figure parmi les leaders européens de la sélection et de la multiplication. Maxime Le Grand, chargé de clientèle agricole, pôle d’expertise CMB de Broons.