Cap sur la voie lactée

Faire découvrir aux enfants l’élevage laitier à travers le parrainage d’un veau. Tel est le projet original que trois étudiantes en agriculture ont concrétisé dans le Sud Finistère. Un établissement scolaire, une cantine et une exploitation travaillant en synergie, voilà un exemple qui pourrait faire école.

À l’issue de la visite de l’exploitation, la phrase a jailli spontanément parmi les enfants. « Moi, quand je serai grand, je veux être agriculteur ! » Un commentaire qui signe la réussite de l’opération menée par Lisa Le Balch, Rozenn Le Goff et Morine Gueguen. Un succès mérité car le trio n’a pas ménagé ses efforts ces dernières semaines.

Dans le cadre de leur formation, ces jeunes étudiantes en deuxième année de BTS Productions animales au Nivot, à Lopérec (29), ont à réaliser un projet de communication. « Nous sommes parties du constat que, même en milieu rural, le lien avec l’agriculture s’est distendu aujourd’hui. Dans une classe d’école primaire, désormais, il n’y a souvent qu’un ou deux enfants avec des parents agriculteurs ». Une méconnaissance de la profession parfois source d’incompréhensions et qui constitue un terreau fertile pour la propagation d’idées fausses.

Afin de renouer le lien entre l’agriculture et la population, et de véhiculer une image plus conforme à la réalité du métier, les trois jeunes filles ont eu l’idée de proposer à des scolaires de parrainer un animal. « Nous avons opté pour une exploitation laitière. En suivant régulièrement la vie d’un veau femelle, de sa naissance à son premier vêlage, cela permet d’aborder de nombreux aspects. » Et de rappeler, par exemple, la nécessité pour la vache d’avoir un veau pour produire du lait…

[caption id= »attachment_32463″ align= »aligncenter » width= »720″]stabulation-ferme-bio-du-Vern Parmi les cinq veaux proposés au parrainage, c’est Orchidée, une Prim’Hosltein, qui a réuni le plus de suffrages. Les élèves recevront désormais de ses nouvelles chaque mois.[/caption]

La carte du local

Pour déterminer l’école et l’exploitation avec lesquelles monter leur projet, les jeunes femmes ont fait jouer leur réseau de relations. Marguerite Gueguen, la mère de Morine, est responsable de la restauration scolaire pour la commune finistérienne d’Elliant. Sous sa houlette, la cantine qui sert quelque 300 repas quotidiens, s’est engagée depuis plusieurs années dans une démarche de lutte contre le gaspillage et en faveur du « manger mieux ». Le tout en veillant à s’approvisionner localement. Tous les yaourts, les fromages blancs ainsi que le lait utilisé en cuisine sont ainsi fournis par la ferme du Vern, à Saint-Ivy (29).

Sur cette exploitation de 70 vaches laitières – le troupeau est composé à parité de Brunes et de Prim’Hosltein -, l’herbe est à l’honneur avec des prairies multi-espèces (mélange de graminées, légumineuses et plantes médicinales). Pionnier du bio il y a une trentaine d’années, Jean-René Cotten a choisi, avec sa sœur Annie, de valoriser la qualité du lait produit sur la ferme, via la création d’un atelier de transformation en 2011. Naturellement riche en protéines, vitamines et oméga 3, le lait « maison » est embouteillé, cru ou pasteurisé, ou bien employé pour la fabrication de yaourts et autres fromages blancs. « Les produits sont vendus auprès de particuliers ainsi que dans la restauration collective. Cela représente environ 100 000 litres par an, soit 20 % de notre production, le reste du lait est collecté par la laiterie Le Gall de Quimper ».

Traite-ferme-bio-du-Vern

Séance de travaux pratiques

En lien avec les institutrices des classes de CP, CE1 et CE2 de l’école Sainte-Anne d’Elliant, Lisa, Rozenn et Morine ont mis sur pied leur opération de parrainage. « Nous avons sollicité différents organismes pour réunir de la documentation et des « goodies », petits cadeaux, à remettre aux enfants. Nous avons également recherché des partenaires financiers. Il a fallu apprendre à vendre notre projet. Cela nous a permis de prendre de l’assurance ! »

La semaine passée, le trio est intervenu en classe durant une matinée pour présenter la production laitière. L’après-midi, tout le monde a pris le car pour une séance de travaux pratiques à la ferme du Vern. Là, avec pédagogie, Jean-René, Annie et Anne-Hélène Cotten (la fille de Jean-René qui va s’installer prochainement sur l’exploitation) ont expliqué leur quotidien. De la pose des boucles à l’écornage, en passant par la traite, les soins à base d’huiles essentielles et d’acupuncture… Chacun a pu questionner, caresser, sentir… Une expérience qui a marqué les esprits. Et nul doute qu’à la cantine d’Elliant, les produits laitiers seront désormais mangés avec encore plus d’appétit !

Au terme de la visite, les enfants ont dû choisir parmi cinq veaux celui qu’ils allaient parrainer. Un filleul dont l’évolution sera scrutée chaque mois durant les deux prochaines années. Au final, la préférence est allée à une petite Prim’Holstein née le 21 janvier. Son nom ? Orchidée. Avec cette belle plante, l’intérêt des enfants pour la voie lactée n’est pas près de se faner.

[caption id= »attachment_32459″ align= »alignright » width= »199″]Daniel-Caugant Daniel Caugant, responsable du marché de l’agriculture au Crédit Mutuel de Bretagne[/caption]

Revisiter son territoire

J’ai été sensible à la démarche de ces trois étudiantes. Se connaître, se comprendre, voilà des choses qui étaient naturelles auparavant dans le monde rural et qui, du fait de l’évolution de la société, se sont un peu perdues. En créant du lien entre les différents acteurs, en établissant un dialogue entre les générations, cela permet de rétablir des relations durables. Même si nous vivons à l’heure de la mondialisation, il y a une demande de plus en plus forte de proximité de la part des consommateurs. Commercer avec son voisin est donc aussi une voie d’avenir.Daniel Caugant, responsable du marché de l’agriculture au Crédit Mutuel de Bretagne


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