Organisé autour d’un pic rocheux de 18 m de haut surplombant l’océan, le jardin de Roscoff (29) présente des espèces florales venues des antipodes.
[caption id= »attachment_35000″ align= »alignright » width= »223″] « Le géranium de Madère, un peu capricieux, fleurit au bout de 4 ans. Les tiges ont la spécificité de s’effeuiller avant de s’abaisser et de servir de tuteurs au pied ! », raconte Sandrine Volle.[/caption]
En ce mois de mai, le jardin associatif de Roscoff ne désemplit pas. « Nous battons des records d’affluence. Beaucoup de Bretons, mais aussi des touristes venus de toute la France et de l’étranger », rapporte Elodie Lelièvre, coordinatrice du site. Certainement l’effet du retour des beaux jours si attendu après un hiver « spécial » et plutôt rude pour tout le monde, y compris pour les plantes pensionnaires. « Conditions très humides, vent d’est, et même gel et neige ici… Il y a eu des dégâts et nous constatons du retard dans les floraisons. Beaucoup de visiteurs profitent d’un passage chez nous pour racheter quelques plantes à replacer chez eux », explique Sandrine Volle, qui est en charge, avec 5 autres salariés, de jardiner dans cet écrin de verdure dépaysant. Mais pas d’inquiétude, la terre, voire la roche, et l’air océanique de ce petit paradis botanique demeurent bien adaptés pour accueillir plantes d’Afrique du sud, d’Australie, Nouvelles-Zélande, Chili, Mexique, îles Canaris ou de Madère… « Bien sûr, nous avons moins de température dans le Nord-Finistère, mais notre rocher de 18 m de haut protège, emmagasine et restitue de la chaleur alors que l’effet du Gulf Stream a aussi un rôle sur notre microclimat. »
Impressionnante hampe florale de l’agave
[caption id= »attachment_34997″ align= »alignright » width= »222″] Sandrine Volle devant les Echiums en fleurs.[/caption]
L’attraction du moment est un agave salmiana. Rare, sa floraison est à chaque fois un petit événement. « D’une part à cause de la taille de la fleur de cette plante originaire du Mexique et d’autre part le fait que cela n’arrive pas tous les ans chez nous », explique Sandrine Volle. « L’individu ne fleurit qu’une seule fois dans sa vie et met toute son énergie à produire cette hampe florale gigantesque. Ensuite, la rosette de feuilles meurt laissant parfois des rejets d’où un nouvel agave pourra se développer. » Ces prochaines semaines, les visiteurs découvriront donc ses inflorescences jaunes qui vont sortir étage par étage.
Dans ce parc d’1,6 ha, de petites allées sinueuses serpentent entre les plantes installées sur des tertres. « Ainsi, les visiteurs découvrent un nouveau massif à chaque détour ». 3 500 espèces de plantes exotiques subtropicales sont présentes, dont 50 % originaires d’Afrique du Sud, une collection nationale agréée par le Conservatoire des collections végétales spécialisées (CCVS). « Régulièrement, nous en introduisons de nouvelles repérées dans des foires spécifiques ou auprès de pépiniéristes spécialisés. En fonction de leur milieu d’origine -mer, montagne, lieu abrité, zone plus humide…-, nous cherchons un endroit adapté », détaille Sandrine Volle. « Dans le but d’avoir un jardin d’aspect naturel, nous laissons les plantes se ressemer d’elles-mêmes à la seule condition qu’elles n’étouffent pas les autres… »
Mais laisser faire la nature ne suffit pas toujours. Alors l’équipe mène un travail de multiplication par semis après prélèvement de graines, bouture ou division pour renouveler les massifs et fournir la boutique du lieu. C’est parfois un sacré challenge. « Par exemple, cannomois est une plante pyrofile de la famille des restionacées : la levée de la dormance de ses graines est normalement stimulée par les vapeurs de fumée des incendies. Ici, nous avons des secrets « maison » pour parvenir à les faire germer… », sourit la spécialiste. « Astuces, serre, couches chaudes, atmosphère contrôlée… Nous faisons des recherches pour savoir comment se propage une espèce. Parfois, il faut retrouver l’acidité du tube digestif d’oiseaux qui ingèrent des graines dans le milieu d’origine et les activent… »
[caption id= »attachment_34999″ align= »aligncenter » width= »720″] Avec son feuillage gracieux et léger, rappelant les prêles de nos zones humides, le cannomois grandis est une plante « haute, légère et assez graphique » de la famille des restionacées.[/caption]
Quand visiter le jardin ?
Un coin réservé aux plantes odorantes
Partout, il y a de quoi s’émerveiller car la magie de la nature, les secrets de plantes méconnues attendent à chaque tournant. Ici et là, de nombreuses ficoïdes, plantes grasses de la famille des aizoacées couvrant le sol et donnant beaucoup de fleurs. « Mais aussi 60 espèces de protéacées offrant une très grande variété de fleurs et de feuillages comme l’embothrium ou arbre de feu, ou encore la protée royale, respectivement emblèmes du Chili et de l’Afrique du Sud… »
Tant de surprises venues de l’autre hémisphère : une belle collection d’eucalyptus, des echiums (Boraginacées) vivaces et tri-annuelles, des broméliacées… « Et même un jardin des senteurs où se côtoient des plantes odorantes telles que tagetes limmonii dont le feuillage aromatique est utilisé dans la cuisine mexicaine, mertensia maritima ou plante-huître, escallonia illinita au parfum de curry, coleonema avec laquelle les pêcheurs se frottaient les mains pour faire disparaître l’odeur du poisson, melianthus major dont la feuille froissée sent la cacahouète… »
[caption id= »attachment_34998″ align= »aligncenter » width= »720″] Elodie Lelièvre présente la boutique du jardin où les visiteurs peuvent acheter certaines plantes subtropicales présentes sur le site.[/caption]