L’assemblée générale du BCEL Ouest, délocalisée à Dinan (22), a été préparée de bout en bout par les éleveurs de la zone Rance-Penthièvre. Parmi leurs invités venus débattre sur « Osons voir les choses autrement », l’éleveur-youtubeur Agriskippy a retenu l’attention.
« Nous sommes 500 000 agriculteurs en France. Si nous avions tous un compte Twitter, ensemble, nous serions plus visibles que Trump », démarre Antoine Thibault, plus connu sous le pseudonyme d’Agriskippy sur les réseaux sociaux. Éleveur laitier à Cintray (27), il cumule 400 000 vues sur sa chaîne YouTube depuis deux ans. « J’y publie des vidéos qui montrent combien mon métier est beau et incroyablement complexe à la fois. Je parle de son aspect social et environnemental. J’explique que mon élevage crée 8 emplois induits et fournit 2 500 personnes en produits laitiers. »
Cette aventure a débuté en novembre 2016 : il ne supportait plus la manière dont « les associations animalistes salissaient l’image des éleveurs. » Au même moment, ses enfants lui font découvrir que YouTube, portail dédié à la diffusion de vidéos, est le 2e moteur de recherche utilisé en France. « Pendant les vacances de Noël, avec les jeunes de la famille, je me suis lancé en créant mon premier film sur le bien-être animal. » L’impact est immédiat et sa production est partagée et vue des dizaines de milliers de fois. « Certains messages font mouche et font le buzz. »
Répondre avec réactivité sur Twitter
À l’assemblée générale de BCEL Ouest, il a invité chacun à tenter l’expérience. Et donné des conseils. « On s’adresse à des gens qui n’y connaissent rien et ils ont le droit de savoir ce qu’il y a dans leur assiette. Je leur dis « Venez, j’ouvre le couvercle ». Parlez de ferme et d’étable, pas d’exploitation et de stabulation ». Et de poursuivre : « La réactivité est primordiale, surtout sur Twitter. L’autre jour, une association a publié une vidéo contre la consommation de lait expliquant notamment que la séparation du veau de sa mère est traumatisante… » Pour répondre, il a dû trouver une idée dans la matinée. « J’ai filmé mes vaches et demandé aux spectateurs de désigner parmi les autres celle, traumatisée, qui venait d’être séparée de sa progéniture… » Le pied de nez a fait un carton.
Antoine Thibault raconte aussi que beaucoup le contactent en lui disant qu’il est une exception. « Pourtant, je travaille comme tout le monde. Sur nos fermes, nous sommes les meilleurs spécialistes mondiaux pour raconter ce qui s’y passe. Il est important que d’autres éleveurs communiquent, avec des robots de traite, des méthaniseurs. La laiterie France, pleine de fermes extraordinaires, ne peut pas se résumer sur la toile à trois agriculteurs qui prennent la parole. » Sur Twitter, Agriskippy explique qu’on est « tout seul » mais qu’il est très rapide de créer une communauté agricole.
Aux interprofessions de s’y mettre ensemble
« Bien sûr, c’est chronophage, mais c’est devenu un plaisir, une passion », raconte celui qui y consacre en moyenne deux heures au quotidien. « D’autres regardent la télé. » Il faut parfois passer du temps pour réaliser une vidéo. « Mais parfois, je filme 5 minutes et je publie aussitôt sans montage. En fait, ce qui prend du temps est de répondre aux réactions des gens et de supprimer les commentaires haineux de certains quand une publication a du succès. » Pour terminer, il a invité les interprofessions à se mobiliser ensemble. « Elles ont les finances pour assurer ce travail. »