La Bretagne produit 1,8 million de tonnes de paille par an. Pas suffisamment pour couvrir les besoins cumulés des élevages de bovins et de volailles de chair. Dans cette situation déficitaire, imaginer engraisser tous les porcs bretons sur paille pour des motifs de bien-être figure de la gageure. Élever 14 millions de charcutiers de la ferme Bretagne sur paille obligerait en effet à importer plus d’un million de tonnes de litière, soit l’équivalent de 200 camions supplémentaires par jour. De belles affaires potentielles pour les entreprises de transport certes, mais pas forcément pour l’environnement. De belles perspectives également pour les céréaliers qui dans cette hypothèse pourraient devenir « pailliculteurs » en se faisant du blé en vendant leur paille.
La pénurie de l’hiver 2018 a en effet montré que le marché de la paille est, non seulement fragile, mais spéculatif et rémunérateur : en mars 2018, la paille se vendait 150 €/t, soit quasiment l’équivalent du prix du grain. De là à dire que, dans quelques années, il sera économiquement plus intéressant de « pailler » les étables avec du grain moulu ! Pas très éthique en tout cas.
À l’heure où tout sous-produit est considéré comme une ressource, le marché de la paille risque en toute vraisemblance d’être plus tendu dans les années à venir. Concurrence entre productions animales soumises à une évolution des normes d’élevage, développement de la méthanisation, production de granulés de paille pour les chaudières, baisse de rendement à l’hectare inhérente à la végétalisation, s’avancent comme autant de facteurs d’échauffement susceptibles de faire flamber le prix de la paille. Sans que cela ne soit un simple feu de paille.