EGAlim : L’indépendance du conseil phytosanitaire gravé dans la loi

Pour acheter un produit phytosanitaire, tout agriculteur devra bientôt présenter un justificatif de délivrance d’un conseil annuel indépendant. - Illustration EGAlim : L’indépendance du conseil phytosanitaire gravé dans la loi
Pour acheter un produit phytosanitaire, tout agriculteur devra bientôt présenter un justificatif de délivrance d’un conseil annuel indépendant.
Le Parlement a adopté le 2 octobre la loi Agriculture et alimentation, dans laquelle il a inscrit l’ambitieux projet du gouvernement de séparer, par ordonnance, le conseil et la vente des produits phytosanitaires.

Après l’adoption définitive le 2 octobre de la loi issue des États généraux de l’Alimentation (Égalim), le Gouvernement est désormais habilité, par ordonnances, à mettre en place la séparation de la vente et du conseil en matière de phytosanitaire. Le document présenté le 28 septembre définit pour l’instant les contours du « conseil annuel ». Il s’appuiera sur « un diagnostic qui comporte une analyse des spécificités pédoclimatiques, sanitaires et environnementales », avec aussi « une analyse des conditions économiques, organisationnelles et matérielles de l’exploitation ainsi que des cultures et des précédents culturaux et de l’évolution des pratiques phytosanitaires ». Ce conseil obligatoire « privilégie les méthodes alternatives », à savoir « non chimiques » et « l’utilisation des produits de biocontrôle ». Pour acheter un produit phytosanitaire, tout agriculteur devra bientôt présenter un justificatif de délivrance de ce conseil annuel indépendant.

Cette première mesure inquiète les syndicats, en ce qu’elle augmente un risque – déjà grand – d’alourdir les charges liées aux phytosanitaires et ne résoudrait pas la question du conseil « au quotidien ». « Le poste phytosanitaire risque d’augmenter fortement, avec la fin des remises, rabais, ristournes, la hausse de 50 M€ de la RPD (Redevance pour pollutions diffuses), le coût du conseil annuel », s’inquiète Christian Durlin, administrateur de la FNSEA en charge de la protection des cultures.

Le poste phytosanitaire sous tension

« Il est hors de question d’accepter un conseil indépendant systématique au moment de l’application des produits phytosanitaires : cela représente une charge supplémentaire pour l’agriculteur », avance le syndicaliste. « Rien ne va changer, à part ce conseil annuel en plus… », estime un autre participant à la réunion le 28 septembre, Jean-François Couëtil (Coordination rurale) qui qualifie d’« hérésie » l’idée d’empêcher de « faire consommer de force des produits » en séparant le conseil et la vente : leur usage est raisonné, défend-il. Mais au-delà, se pose aussi la question de la disponibilité du conseil indépendant. « Comment imaginer que le conseil annuel va remplacer le conseil au quotidien ?, » s’interroge Jean-François Couëtil.

« Déficit » en conseil quotidien

Du côté des distributeurs de phytosanitaires, si la FNA (Fédération du négoce agricole) y « voit assez clair » dans le contenu du projet d’ordonnance sur le conseil annuel, d’autres points lui semblent encore flous. Le projet prévoit d’un côté un conseil « indépendant de toute activité de vente ou d’application ». Et de l’autre, un vendeur qui fournit aux utilisateurs « les informations appropriées concernant l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ».

Mais quid de ses autres prérogatives ? Damien Mathon, délégué général de la FNA, met en garde contre « un gros déficit en conseil quotidien si la relation entre l’agriculteur et le vendeur se limite à la délivrance de produits avec la notice d’emploi ». Sur le plan du droit, il lui semble « compliqué d’interdire à l’OS (organisme stockeur, qui aujourd’hui réalise la collecte de grains, la vente de phytosanitaires et le conseil, NDLR) de donner des préconisations ».

« 3 000 conseillers à trouver »

Le chemin vers la séparation vente/conseil est semé d’embûches. 300 000 exploitations sont concernées, d’après les calculs de la FNA. Sur la base de deux journées de conseil annuel pour chacune, « reste 3 000 conseillers à trouver ». Pas facile d’y arriver en quelques mois, la date de mise en œuvre évoquée par le Gouvernement étant le 1er janvier 2019… La proposition d’ordonnance étant désormais sur la table, un délai est fixé jusqu’au 26 octobre pour que les organisations fassent part de leurs remarques.


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