L’Europe n’a pas vécu de famine climatique depuis 170 ans. C’était de 1845 à 1849, quand la pluie incessante pourrissait les récoltes de pomme de terre en Irlande. Plus d’un million de personnes périrent de faim et près de 2 millions émigrèrent. Pas sûr qu’aujourd’hui, ils fussent aussi bien accueillis en Amérique.
Avec la sécheresse qui a sévi cet été, ce n’est pas de famine climatique humaine qu’il est question en Europe. Mais de pénurie fourragère pour les animaux. En Suède, Allemagne, Belgique, Pays-Bas et dans une partie de la France, les éleveurs découvrent avec stupéfaction les effets directs du réchauffement climatique. Avec des silos et des hangars à moitié vides, ils n’ont d’autre choix que de réduire leur cheptel ou acheter des fourrages. Avec des répercussions en cascade jusqu’en Bretagne. Le foin et la paille sont pris d’une folie des prix, excitée par la pénurie, mais aussi par la spéculation « honteuse » que dénonce la Confédération paysanne nationale.
Et le syndicat de s’insurger face à un prix de la paille qui est passé de « 70 à 140 €/t » (jusqu’à 160 €/t) et du foin qui « a presque doublé ». Car, si jusque un passé récent, le commerce fourrager demeurait très local, aujourd’hui il est européen. Des Suédois n’hésitent plus à traverser l’Europe pour s’approvisionner jusqu’en Espagne ! Région propice à l’herbe, la Bretagne deviendra-t-elle demain le grenier à foin d’une Europe en proie à des sécheresses à répétition ? Il est à parier qu’avec un prix du lait seulement deux fois plus élevé que la tonne de fourrage, des agriculteurs feront vite le calcul. Un bon choix économique peut-être, mais pas forcément judicieux sur le plan environnemental.