En Bretagne, la récolte de maïs ensilage est caractérisée par une teneur élevée en matière sèche cette année. En août et septembre, les plants de maïs ont rapidement séché sur pied et les teneurs en matière sèche ont très vite évolué. Le cru 2018 est marqué par une forte hétérogénéité en termes de qualité.
Les faits évoqués ci-dessous se basent sur les analyses d’ensilages maïs effectuées chez les adhérents suivis par les techniciens conseil ruminants Triskalia, ainsi que sur les observations terrains.
« Au mieux autant de lait que l’an passé et de meilleurs taux »
Cette remarque ressort régulièrement cette année. Au niveau des résultats d’analyses de lait dans les élevages Triskalia, le TB est supérieur de 1,3 point en moyenne depuis mi-octobre par rapport à la même période l’an passé : 43,8 g/L (contre 42,5 en 2017). En ce qui concerne le TP, il est supérieur de 0,6 point en moyenne : 34 g/L (contre 33,4 l’an passé). Cela permet aux éleveurs de bénéficier d’une meilleure plus-value. En revanche, les premiers retours sont très hétérogènes en ce qui concerne le potentiel laitier des ensilages. Plusieurs secteurs subissent une baisse de production de 2 à 3 kg de lait. Dans d’autres endroits, elle reste stable. Il convient alors d’étudier la qualité de cette nouvelle récolte, pour s’y adapter le mieux possible et optimiser la production des vaches laitières. Les données moyennes qui suivent proviennent des 961 analyses d’ensilage de maïs fermenté de la récolte 2018, réalisées par le laboratoire Capinov.
[caption id= »attachment_37982″ align= »aligncenter » width= »720″] Profil des maïs ensilages en 2018 (analyses Capinov) : des maïs plus secs, moins digestibles et moins riches en protéines.[/caption]
Des maïs ensilages très secs
La teneur moyenne en matière sèche (MS) est de 36 % cette année, soit 3 % de plus que l’an passé, avec des échantillons culminant à 48 % Pour une ration hivernale constituée en partie de 15 kg MS d’ensilage de maïs par vache par jour, si la teneur en MS du maïs est plus élevée de 8 % cette année, il faut en distribuer 10 kg brut de moins ! Apporter 15 kg MS se fait par 47 kg brut d’un ensilage maïs à 32 % de MS, ou bien par 37 kg brut d’un ensilage à 40 %. Il convient donc de diminuer la quantité brute de maïs ensilage distribuée, et non pas celle des autres constituants (sous peine de déconcentrer la ration).
Une teneur en protéines impactante
La teneur en MAT (Matières azotées totales) des ensilages maïs est de 6,3 % cette année, contre 6,9 % en 2017. La teneur en PDI diminue, avec une perte de 5 g/kg de PDIN. L’écart PDIN-PDIE est donc accentué (28 points, contre 25 en 2017). Ce déficit plus marqué doit être corrigé. Cette observation rejoint les résultats d’analyses de lait dans les élevages Triskalia : les taux d’urée du lait depuis mi-octobre sont inférieurs de 50 mg/L par rapport à la même période l’an passé (200 mg/L en 2018). L’équation n’est pas mathématique, mais cela peut révéler un déficit protéique dans la ration.
Pour une ration contenant 15 kg MS d’ensilage maïs, le déficit en MAT de la récolte 2018 engendre une complémentation de 4 kg de correcteur azoté, contre 3,6 kg en 2017. Ces apports doivent donc être augmentés de 400 g/vache/jour minimum. L’apport d’urée est également recommandé, mais attention au déficit en PDIE. De plus, l’ensilage de maïs est souvent accompagné d’ensilage d’herbe ou d’enrubannage dans les rations. Ces fourrages complémentaires ont aussi une teneur en protéines plus faible cette année, accentuant encore le déficit azoté. Dans le cas de maïs très secs et faibles en protéines, l’apport d’aliment liquide peut être une excellente solution, permettant d’améliorer l’appétence et la digestibilité des rations via sucres et azote soluble.
Une fibre moins digeste pénalise la valeur énergétique
La valeur énergétique (UFL = Unité fourragère lait) du maïs provient de deux sources : l’amidon et la fibre. La teneur en amidon augmente légèrement : 33,4 % contre 33 % l’an passé. Il convient d’observer les bouses : si on y retrouve des grains de maïs en l’état, l’ensilage de maïs peut être riche en amidon intestinal. Si on ne retrouve pas de grains dans ces bouses, l’amidon est plutôt digéré dans le rumen. Le choix de l’aliment de production à apporter se base sur ces observations et sur les résultats d’analyses qui distinguent l’amidon en trois catégories : rapide, lent ruminal et intestinal.
La teneur en fibres (NDF = hémicellulose, cellulose, lignine) est légèrement plus élevée (41,3%). Néanmoins, la digestibilité de la fibre (dNDF) est pénalisée : elle passe de 58 % en 2017 à 55,7 % en 2018. L’idéal est d’être supérieur à 58 %. La fibre apportée est donc moins digestible et pénalise le niveau énergétique du fourrage. Du fait d’une teneur en amidon globalement stable et d’une fibre moins digestible, la valeur énergétique du cru 2018 est donc légèrement inférieure : 0,91 UFL (contre 0,92 UFL en 2017).
Le critère dNDF est primordial
Concernant la digestibilité du maïs ensilage, le critère dNDF apparaît sur les résultats d’analyses depuis septembre. C’est un excellent indicateur de l’efficacité alimentaire des rations. Dans les cas de maïs présentant une dNDF faible, la réponse en lait est compliquée, c’est un fait marquant cette année. Plusieurs adaptations sont à mettre en place pour améliorer les performances.
Tout d’abord, il est nécessaire d’apporter 3 kg MS d’un fourrage complémentaire, ayant une dNDF supérieure à celle du maïs, dans l’idéal supérieure à 60 %. Ensuite, l’apport de levures vivantes dans la ration via Adovilevures va permettre de stimuler la flore cellulolytique du rumen, mieux digérer la fibre et donc améliorer l’efficacité alimentaire. De plus, les correcteurs azotés Adelia contiennent des adjuvants permettant de booster la flore du rumen (particulièrement Adelia Boost, bien adapté à ces maïs), et donc d’augmenter la digestion de la cellulose et la synthèse de protéines microbiennes.
Un risque mycotoxines accru dans certains secteurs
Les perforations des plantes effectuées par les larves de pyrale sont une réelle porte d’entrée pour les champignons, pouvant générer des mycotoxines dans le fourrage. En Bretagne, et notamment dans la zone Est, le risque mycotoxines est cette année plus important.
David Falc’hun / Triskalia