Premier des trois syndicats présentant une liste pour les prochaines élections professionnelles à organiser son metting de campagne, la Confédération paysanne veut tout autant des prix que des aides justes.
« Sur la durée de la mandature qui se termine, la Bretagne a perdu 6 000 paysans. C’est une véritable casse sociale », a lancé Jean-Marc Thomas en introduction du meeting de la Confédération paysanne dans le cadre des prochaines élections professionnelles. À Plérin, ce mercredi 9 janvier, devant une centaine de sympathisants, le syndicaliste a insisté : « On nous a promis de libérer les énergies, en voulant suivre un modèle danois ou hollandais basé sur la production de minerai en gros volume et à pas cher, que la Bretagne allait nourrir le monde en étant la plus compétitive d’Europe… » Le producteur de lait de Rostrenen dénonce une course effrénée vers des exploitations plus grandes, plus d’investissements, plus de charges, plus de travail, plus de stress et de pression et plus découragement. « C’était une vision timorée, à court terme, des responsables agricoles devant les enjeux sociétaux. Ni les biocarburants, ni l’eldorado chinois, ni la méthanisation n’ont sauvé le revenu des agriculteurs : rien n’a ruisselé. »
Dans une campagne où « la question du revenu s’invite partout alors que la Confédération paysanne en parle depuis des décennies », Isabelle Allain, secrétaire générale du syndicat départemental et tête de liste pour le prochain scrutin, pense qu’il est temps de changer de cap « pour un projet motivant qui donne envie de relever les défis collectivement et permette à chaque paysanne ou paysan de retrouver revenu et enthousiasme à pratiquer son métier. »
Après les EGA, manque un pouvoir politique fort
Invité pour l’occasion, Nicolas Girod, secrétaire national de la Confédération paysanne, en charge du pôle élevage, n’a pas oublié les mots du président Macron lors de son discours de Rungis à propos de la rémunération : des prix justes, la possibilité de vivre dignement de son métier et l’accès à une alimentation de qualité pour tous… « Nous nous sommes beaucoup battus pour interdire à nos partenaires de l’aval d’acheter nos productions en dessous des coûts de production. Les Etats généraux de l’alimentation ont pris en considération nos revendications. Mais nous nous rendons compte que les responsables politiques n’ont pas vraiment la volonté de contraindre les acteurs économiques des filières à se responsabiliser en répartissant plus justement la valeur… », regrette le producteur de lait à Comté et Morbier installé en Gaec dans le Jura. Il cite notamment l’exemple de la filière viande bovine pour laquelle les négociations sont au point mort à l’Interprofession, « les industriels n’étant même pas prêts à intégrer un bout de rémunération paysanne dans leur prix d’achat ».
Restaurer une Pac ambitieuse et plus juste
Outre le travail sur les prix, la prise en compte des coûts de production et le revenu à l’échelle nationale, les candidats rappellent combien l’enjeu de la prochaine révision de la Pac est primordiale. « Entre 2013 et 2018, la Bretagne a perdu 100 millions d’euros d’aides du premier pilier », avance Jean-Marc Thomas. « C’est extrêmement pénalisant pour tous. » Aujourd’hui, la Confédération paysanne prône globalement un meilleur partage des fonds européens. « Cela passe par exemple par un plafonnement des aides Pac par exploitation au profit d’un soutien davantage fléché vers les petites fermes et surtout vers les actifs pour stopper cette course folle aux hectares primables. » Les syndicalistes promettent de ne « rien lâcher » du côté de Bruxelles « pour obtenir cette fameuse régulation indispensable » pour préserver les agriculteurs dans un monde volatil. Ils veulent également un budget important sur les mesures agro-environnementales et le bio : « Sans argent, les agriculteurs français ne feront pas la transition agro-écologique attendue par la société. »
Moderne et solidaire
En conclusion de la soirée, Isabelle Allain a insisté sur la vision à long terme de la Confédération paysanne « qui anticipe les réponses aux enjeux de demain au lieu de faire dans l’urgence et la contrainte. » La productrice de lait de Ploubezre se dit impatiente d’œuvrer pour que le métier soit reconnu à sa juste valeur et porter un projet d’agriculture paysanne « moderne et solidaire ».