« On n’arrivait plus à faire face »

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Écouter. D’abord écouter, pour mieux accompagner. C’est ce à quoi s’attellent les bénévoles de Solidarités paysans qui accordent du temps à des agriculteurs sur la voie de l’exclusion.

[caption id= »attachment_40118″ align= »alignright » width= »146″]Raphaëlle Gourlaouen Raphaëlle Gourlaouen[/caption]

Raphaëlle Gourlaouen a accepté de témoigner. « Si mon histoire peut servir à d’autres, alors… ». Le 4 avril, à Carhaix, cette productrice de pommes à Riec-sur-Belon (29) a raconté sa descente progressive vers l’enfer financier. « Installée en 1989, je me suis retrouvée seule sur la ferme en 2001. Je n’ai pas su voir que la technique que j’appliquais n’était pas faite pour ma petite structure ». Surviennent alors les découverts, les agios. Le plan pour agriculteurs en difficulté n’y change rien. « J’étais repartie en faisant les mêmes erreurs. Je ne pouvais donc pas suivre le plan de remboursement que les créanciers m’avaient fixé », a-t-elle expliqué lors de l’assemblée générale de Solidarités Paysans Bretagne.

Faire appel plus tôt

Face à ces difficultés récurrentes, son comptable lui conseille de s’adresser à une assistante sociale… qui l’invite à son tour à contacter l’association Solidarité paysans. « Les bénévoles m’ont écoutée. Nous avons fait un nouveau plan de restructuration », détaille Raphaëlle Gourlaouen qui n’a qu’un seul regret : « Ne pas avoir fait appel à l’association dès le premier redressement. Mais je ne connaissais pas et je ne savais pas à qui m’adresser ».

« Je voulais rester agricultrice »

Aujourd’hui, la situation de l’arboricultrice s’est améliorée. « Même si financièrement, c’est toujours juste. Mais je voulais rester agricultrice et, sur ce point, je suis heureuse », sourit-elle. «J’ai appris à être moi-même. Désormais, je prends mes propres décisions, libérée des techniciens, de l’administration, etc. C’est une grande victoire », se félicite l’agricultrice finistérienne. Et de conclure : « Si l’on pouvait inculquer l’indépendance aux agriculteurs, ce serait une victoire pour la profession ».

[caption id= »attachment_40119″ align= »alignright » width= »151″] Thomas Hobbs[/caption]

Soixante-dix kilomètres plus au nord, à Lohuec, dans les Côtes d’Armor, Thomas Hobbs a connu de similaires mésaventures financières. Installé en 2015 avec ses parents, le jeune hom-me connaît rapidement des difficultés, amplifiées avec la mauvaise conjoncture laitière de 2016. « On n’arrivait plus à faire face aux factures et aux remboursements d’emprunts », explique le jeune homme. Avant de confier : « On avait peur d’appeler car nous craignions les réactions des créanciers… et des voisins ».

Une fois encore, c’est le comptable – ce confident des comptes et des vies des agriculteurs – qui incite la famille à se tourner vers Solidarité paysans. « Nous nous sommes décidés le jour où il n’y avait plus de sous pour payer », se souvient Thomas Hobbs qui, dans ces moments, a pensé tout arrêter. « Mais c’est notre passion… », lâche le jeune agriculteur qui reconnaît « avoir pris de mauvaises décisions qui, associées à la conjoncture, ont conduit l’exploitation dans l’impasse. Le seul regret, c’est de ne pas avoir fait appel 6 mois, voire un an, plus tôt ».

« Remettre debout »

À chaque fois, les gens accompagnés disent : vous nous avez écoutés. Car, quand des difficultés financières pointent, il n’y a pas que le redressement de l’exploitation, il y a aussi les personnes qu’il faut souvent remettre debout. C’est pourquoi, à chaque fois, nous leur expliquons que chacun a droit à l’échec. Il faut chasser ce sentiment de culpabilité. Le mot clé pour faire du travail d’accompagnement, c’est la confiance. Enfin, même si nous n’intervenons qu’à la demande, il faut insister sur la nécessité d’intervenir précocement.


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