Suivre le taux cellulaire de près grâce à l’ADN

Grâce à une seringue, tous les 15 jours, Grégory Breton prélève un échantillon d’une traite dans le tank. Suite au génotypage de toutes les vaches, ce lait de mélange va permettre de déterminer en laboratoire le taux cellulaire de chaque animal. - Illustration Suivre le taux cellulaire de près grâce à l’ADN
Grâce à une seringue, tous les 15 jours, Grégory Breton prélève un échantillon d’une traite dans le tank. Suite au génotypage de toutes les vaches, ce lait de mélange va permettre de déterminer en laboratoire le taux cellulaire de chaque animal.
Les associés du Gaec Breton, à Changé (53), ont opté pour un service simple et innovant pour obtenir des résultats de comptage cellulaire plus réguliers suite à un problème de qualité du lait.

« Chaque année, il y avait toujours unE période critique en termes de cellules. Générale-ment de la Toussaint jusqu’en janvier. Mais il y a deux ans, les comptages ont explosé et le problème a perduré… », raconte Grégory Breton qui s’est installé en 2017 en s’associant à ses frères Thierry et Cédric. « Nous attendions le 10 du mois pour savoir combien nous avions perdu sur notre paie de lait alors que nous avions fourni la même quantité de boulot. À l’époque, sur l’exercice comptable, les pénalités avaient fini par représenter une perte d’environ 8 000 €. » Une situation difficile et stressante.

Un taux cellulaire tous les 15 jours

Les mois passaient et les résultats de qualité du lait continuaient d’être impactés. Pourtant, côté stabulation, l’hygiène du couchage était surveillée de près. « Nous apportons beaucoup de paille : 3 rounds par jour, soit 7 à 8 kg par vache. Et depuis 4 ans, nous curons toutes les semaines. »

En janvier 2018, les éleveurs décident donc de souscrire à GénoCellules, un nouvel outil pour aborder la gestion de la qualité du lait proposé par Seenovia (organisme de conseil des Pays de Loire). Ce système permet de connaître le statut cellulaire individuel de chaque vache grâce à son ADN (voir encadré) à partir de l’analyse d’un simple échantillon de lait de mélange prélevé dans le tank. Au démarrage, il a fallu génotyper toutes les vaches à partir d’un petit prélèvement de cartilage à l’oreille. « Cela a coûté 42 € par animal. C’est un investissement. Et aujourd’hui, nous poursuivons au rythme de 25 génisses par an. L’autre intérêt est que si les animaux sont génotypés assez jeunes, les résultats servent également à l’heure d’élaborer le plan d’accouplement. »

Un transporteur récupère le prélèvement

[caption id= »attachment_40337″ align= »alignright » width= »242″]Le prélèvement de lait est glissé dans une enveloppe déposée sur le marchepied du tank. Un transporteur passe dans la journée la récupérer. Le prélèvement de lait est glissé dans une enveloppe déposée sur le marchepied du tank. Un transporteur passe dans la journée la récupérer.[/caption]

« Au moment d’opter pour ce nouveau service, nous avons basculé de 12 à 6 contrôles classiques de performances (production, TB TP, cellules…) par an. Pour cela, nous effectuons les pesées nous-mêmes après location de Trutest. Mais en complément, nous disposons désormais de 18 kits de prélèvement », détaille Grégory Breton. Ainsi, entre deux contrôles complets intervenant tous les deux mois, nous faisons un test GénoCellules tous les 15 jours. « Le gros intérêt de cette fréquence augmentée : dès qu’une vache monte en cellules, on peut écarter rapidement son lait pour ne pas pénaliser le tank. »

Dans la pratique, l’échantillon de lait est prélevé à la traite qui suit le passage du laitier. La seringue contenant une petite dose de conservateur est glissée dans une enveloppe portant une étiquette à code-barres identifiant l’élevage. Une fiche précise le nombre de vaches traites et le litrage dans le tank… Le pli est ensuite posé sur le marchepied du tank. Un transporteur vient lE récupérer dans la journée. « Parallèlement, je précise sur le site web les vaches dont la production est présente dans le mélange. En fait, je décoche dans la liste de tous nos animaux ceux qui sont absents : taries, lait écarté… Et j’importe les quantités individuelles produites par chaque animal relevées par nos compteurs à lait. »

Résultats, une semaine plus tard

Une semaine plus tard, les résultats arrivent par mail. « Je les transmets à notre vétérinaire qui refait une synthèse vache par vache. En fonction, on cible les plateaux CMT à réaliser pour identifier un quartier touché ou les analyses bactériologiques à mener, les animaux à écarter, les choix de traitement et les réformes à envisager. Ce serait intéressant de recevoir ces données de taux cellulaire plus vite encore, des travaux sont menés dans ce sens par le prestataire pour le raccourcir. »

Les éleveurs disposent également d’autres seringues et enveloppes qui servent à tester le lait d’une seule vache, par exemple en délai d’attente. « Dans ce cas-là, le prélèvement de lait est effectué directement dans le bidon de traite écartée. Comme ce n’est qu’un comptage cellulaire d’une vache isolée, en 48 heures, nous avons les résultats. Cela offre la possibilité de faire un point sur l’efficacité du traitement mené », explique l’éleveur.

4 300 € par an pour 75 laitières

Au total, pour 75 vaches laitières, le prix du service GénoCellules atteint 4 300 € par an (kits de prélèvement, passages du transporteur, analyses du lait et génotypage des génisses de l’année). « Pour nous, c’est un bon outil. Les résultats de numérations cellulaires beaucoup plus rapprochés permettent de mieux suivre la santé mammaire à l’échelle du troupeau », estime Grégory Breton. « Il y a un an et demi, certains tanks dépassaient le taux de 750 000 cellules… En début d’année, nous étions redescendu à une moyenne de 170 000. Ça s’est beaucoup amélioré, mais nous sentons que cela reste fragile. Nous restons prudents et GénoCellules apporte une certaine assurance… » Pour les associés l’amortissement du coût de ce service passe bien sûr par moins de pénalités. « Et nous avons désormais l’opportunité de mieux détecter les animaux touchés pour les traiter plus tôt avec davantage de chance de réussite et moins de risque de récidives qui coûtent en termes de soins. »

GénoCellules, comment ça marche ?

« Chaque animal a un ADN différent que l’on identifie par le génotypage. Ensuite, cet ADN peut être identifié dans les cellules leucocytaires présentes dans le lait de mélange. Une seule goutte suffit pour obtenir les résultats individuels de toutes les vaches », explique Pierre Lenormand, ingénieur R&D chez Seenovia. A condition de savoir combien a produit chaque animal au cours de la traite dont le lait de mélange est analysé : l’idée est de savoir la responsabilité de chaque individu dans le taux cellulaire global. « C’est pour cela que l’éleveur doit préciser sur notre site quel volume a donné chaque vache. En général, il suffit de reporter les mesures des compteurs à lait. » Mais pas de panique, celui qui n’est pas équipé peut aussi profiter du service : « Nous utilisons alors un logiciel de prédiction laitière qui calcule en fonction du stade et du rang de lactation de chaque animal sa production… »

Pour Agathe Moisan, effectuer une pesée de temps en temps est « très intéressant pour se refaire l’œil » et mettre en perspective les mesure proposées par les herbomètres qui sont tout de même une très bonne base de réflexion. Pour ce faire, grâce à une petite tondeuse électrique, on récolte dans un seau l’herbe d’un carré 50 x 50 cm (0,25 m2), en laissant un résiduel de 1 500 kg MS / ha (150 g / m2) qui correspond à la hauteur de sortie visée après passage des animaux. Puis, à l’aide d’un pèse-valise (ou d’une balance de cuisine), on détermine la masse du fourrage récupéré. « Aujourd’hui, à Plumaugat, on trouve 130 g d’herbe sur cette surface de 0,25 m2, soit 0,52 kg / m2. Avec un taux de matière sèche de 17 ou 18 % actuellement (début mars), ramené à l’hectare, on obtient 884 kg à l’hectare. Auxquels on rajoute les 1 500 kg de résiduels que nous avons laissés au départ pour obtenir 2 500 kg de matière sèche totale à l’hectare… » Reste ensuite à comparer le résultat de ce calcul à l’indication de l’herbomètre… À la réglette, la hauteur d’herbe était de 10 à 11 cm.

Un Staphylocoque dans le moteur

Suite à la dégradation de la qualité du lait début 2017, les éleveurs ont mené des analyses vache par vache (voire quartier par quartier) poussées avec le vétérinaire et l’entreprise de conseil en élevage. « En mars 2018, nous avons fini par découvrir la présence d’un Staphylocoque doré qui contaminait les animaux au cours de la traite. Avec une installation 2×5 où environ 7 vaches passent sur le même poste à chaque traite, le troupeau a vite été plombé. Il a fallu réformer les vaches chroniquement infectées, réadapter la stratégie de soins. » Par ailleurs, deux épisodes de tests dynamiques à la traite, la révision de la machine et certains réglages (niveau de vide, pulsation) ont aussi permis d’améliorer la situation. « La pulsation était trop agressive et du lait restait dans les mamelles. »


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