Gare aux contrastes

 - Illustration Gare aux contrastes
Les bovins se méfient des contrastes et ont besoin de temps pour s’adapter à un changement de luminosité, comme lors d’un déplacement de lot ou un embarquement. Mais, « animaux d’habitude », ils s’accoutument aux situations répétitives du quotidien.
Quand on travaille au quotidien avec des bovins, il est important d’appréhender la manière dont ils voient et perçoivent la lumière.

Les vaches, les moutons ou les chèvres ont des visions très différentes de l’homme, rappelle Anne Aupiais, cheffe de projet « bien-être et comportement des herbivores » à l’Idele – Institut de l’élevage. « Pour travailler avec eux, il faut essayer de penser bovins. Sinon, on risque de prendre des risques inconsidérés en méconnaissant leur comportement et leur perception », recommande l’éthologiste de formation.
Il faut par exemple bien prendre conscience que les bovins ont une vision plus décomposée que nous. « Comme s’il y avait un effet stroboscope », illustre-t-elle. « Cela explique pourquoi il faut toujours les approcher doucement pour qu’ils aient le temps de nous reconnaître », explique la spécialiste qui anime le réseau des formateurs manipulation – contention des bovins. « Le chien de troupeau profite de ce phénomène en circulant très vite autour d’un groupe d’animaux. Ces derniers ont l’impression que c’est une « barrière ». Ils ne sont pas impressionnés par la taille du chien mais par la rapidité de ses mouvements… »

Des bovins facilement éblouis

« Les contrastes lumineux gênent énormément les bovins. Parfois, un détail comme une plaque métallique qui reflète beaucoup les bloque totalement », rappelle Anne Aupiais. Leur adaptation au changement de luminosité (passage d’un endroit sombre à un endroit très éclairé ou l’inverse) serait cinq fois plus lente que chez l’homme. La présence du tapetum lucidum, une structure en arrière de la rétine qui renvoie beaucoup de lumière, les rend notamment très sensibles aux fortes luminosités. « En conséquence, aujourd’hui, nous travaillons de plus en plus avec les spécialistes du bâtiment pour éviter qu’une zone d’embarquement soit placée face au soleil levant. » À éviter notamment, le passage d’un pont de chargement qui réfléchit entre l’étable et le camion à l’ambiance sombre. Les passages canadiens tirent aussi leur efficacité de ce jeu de contraste créé par les barres qui renvoient de la lumière.

Efficace rubalise

Une bétaillère rouge ou jaune qui brille ou une salle de traite flambant neuve et de couleur claire peuvent poser des difficultés au départ. Ou un pont métallique qui pousse les bovins à s’orienter vers un quai plutôt que l’autre… « Mais en général, les choses rentrent peu à peu dans l’ordre car le bovin est un animal d’habitude. »
Dans la pratique, il est possible de tirer profit des caractéristiques oculaires des bovins. Par exemple, le ruban de signalisation (rubalise), avec son alternance de rouge et de blanc, son aspect brillant et éblouissant, est ainsi très efficace pour parquer des animaux. « Une rubalise placée au sol peut suffire à garder un lot de génisses qui n’osent pas l’enjamber. Placée à hauteur d’yeux, elle sera aussi très efficace pour des ovins. »

« Une forme de daltonisme »

Les vaches n’ont pas la même structure d’œil que nous. Dans la rétine, en comparaison à l’homme, le type de cellules présentes est différent : « Les bovins ont davantage de bâtonnets que nous, mais moins de cônes… Ainsi, ils ont moins de notion de dégradé, ils discernent moins les couleurs. Cela renvoie à une forme de daltonisme », explique Anne Aupiais. Pour mieux appréhender la manière dont voient les bovins, il est possible de télécharger sur son smartphone l’application Daltonizer. Sur ce simulateur, en choisissant l’option « daltonisme protanope », vous pourrez comparer une image vue par un homme ou un bovin.


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