L’ascension incertaine des fermes verticales

 - Illustration L’ascension incertaine des fermes verticales
La question de savoir si le consommateur se laissera séduire par cette agriculture reste entière.
Les fermes high tech se développent rapidement dans les centres urbains d’Asie, d’Amérique du Nord et d’Europe occidentale. Quelques 400 installations en activité sont recensées dans le monde.

Avec les avancées liées aux lampes Led, à la robotique et aux technologies de l’information, apparaissent des unités de production en salle sur plusieurs niveaux, à l’emprise au sol réduite, vouées à la culture intensive de végétaux, notamment des salades. Contrairement aux serres, ces fermes high tech se passent de lumière naturelle et s’affranchissent de l’environnement extérieur (dé-saisonnalité, déterritorialisation). L’ambition de ces techno-farms est forte : produire en masse des denrées de qualité, aux prix du marché, à tout moment, sous tout climat, au plus près des consommateurs et sans recours aux pesticides.

Pas de grand saut de productivité

Pour l’heure, ces fermes indoor s’inscrivent encore dans une économie de « promesses technoscientifiques, de startup et de capital-risque », résume Florent Bidaud, dans une analyse du Centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture (1).

« Des communiqués des entreprises impliquées dans ces modes de production invitent à l’optimisme, certaines se prévalant de productions 120 fois supérieures à la culture de pleine terre (Agricool, production de fraises), voire 350 fois supérieures (Aerofarms, légumes-feuilles) ». Reste que l’interprétation de ces résultats doit tenir compte du nombre de cycles de cultures et d’étages de l’installation comparativement à la culture en pleine terre. « Les études sur le sujet font état de niveaux de production proches de ceux obtenus avec les itinéraires techniques habituels, plutôt qu’un grand saut de productivité », expose l’analyse du Centre d’études et de prospective.

Volonté de « disrupter » l’agriculture

Les fermes verticales nécessitent des investissements lourds. Au Japon, les entreprises qui s’engagent dans cette voie ont peu d’attaches avec le secteur agricole. « De grands groupes de l’électronique et de l’énergie ou de l’immobilier créent des filiales pour leurs projets de plant factories », indique encore l’auteur de l’étude qui parle d’un investissement de l’ordre de 500 €/m² de culture. En marge des gros groupes, une centaine d’entreprises de plus petite taille s’essaient aussi à la production confinée. Se présentant comme des startups vouées à « disrupter » l’agriculture, certaines réussissent à mobiliser des fonds considérables : 226 millions de dollars pour Plenty, l’apport principal provenant d’un fonds lié à un groupe japonais de télécommunications ; 90 millions pour Bowery, financé par Google Ventures ; 28 millions d’euros pour le dernier tour de table d’Agricool, en France, qui a réuni la Banque publique d’investissement et des grands patrons innovants. À noter cependant que si des investisseurs et des industriels, au Japon et aux États-Unis, considèrent les fermes verticales comme une solution d’avenir pour les systèmes alimentaires, de nombreux projets se sont soldés par des faillites.

Et le consommateur ?

La rareté relative des différentes ressources énergétiques déterminera sans doute l’intérêt, dans les prochaines années, des diverses options : plein champ, serres ou tours maraîchères. De fait, ces dernières ont sans doute un avenir dans des pays poldérisés ou montagneux comme le Japon, ou aux climats extrêmes comme la Russie et ceux du Moyen-Orient. Des incertitudes fortes demeurent quant au comportement des consommateurs. « Ces nouveaux systèmes productifs vont à contre-sens de certains discours réclamant une agriculture plus naturelle, moins technicisée et intensive », soulève Florent Bidaud.

(1) : Synthèse complète sur agreste.agriculture.gouv.fr


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