« Savoir est vertigineux », condense en trois mots la philosophe et écopsychologue américaine Carolyn Baker. Autrement dit, savoir, et se savoir impuissant face à ce que l’on sait, donne le vertige. Il en va des grandes catastrophes naturelles, des guerres prévisibles, des maladies, etc., contre lesquelles on n’y peut rien. Quoique… Car « savoir » et « prévoir » sont compagnons de bonne fortune. Par exemple, un agriculteur qui sait que 3 étés sur 5 ses ray-grass sont pénalisés par une sécheresse prévoira de modifier son assolement en conséquence. En agriculture, les exemples où le fait de savoir permet de prévoir sont nombreux. Et ils illustrent prosaïquement que ne pas vouloir savoir ne protège en rien l’ignorant. Au contraire.
Les milliers d’agriculteurs qui se sont pressés cette semaine au Space ont bien intégré le fait que le savoir est constitutif de la pérennité de leur exploitation. Découvrir, observer, s’étonner devant des nouveautés, sentir les évolutions à venir, est essentiel pour se projeter dans le futur. Cela a toujours été ainsi. De tout temps, des agriculteurs plus curieux que d’autres ont osé l’innovation. En prenant une longueur d’avance, ces pionniers ont souvent conforté la prospérité de leur ferme et leurs méthodes ont été largement copiées.
Mais enrichir son savoir ne se résume pas à copier ou à se laisser séduire par la dernière innovation. Le savoir se construit en confrontant les avis, en piochant dans le vaste creuset de connaissances et d’informations disponibles – dont fait partie la presse agricole –, en décortiquant certaines « vérités » qui ne sont parfois que de légers arguments de vente. C’est alors que le savoir peut devenir différemment vertigineux. Non pas parce qu’il rend impuissant, mais plus puissant.
Le savoir