Des confins du Kazakhstan à la Bretagne, la pomme est le fruit d’un long voyage dans le temps et dans l’espace. Et surtout, le fruit de 2 000 ans de métissage et de greffage. Le fruit défendu qui aurait perdu le monde a gagné bien d’autres batailles. Dont la première victoire est celle d’avoir traversé le temps. L’homme est juvénile à côté du vénérable pommier sauvage apparu sur Terre il y a au moins 45 millions d’années. Aujourd’hui encore, dans les « monts célestes » du Tian Shan subsistent des forêts primaires de Malus sieversii, l’ancêtre commun du pommier domestique qui s’est si bien accommodé à la Bretagne. Reste qu’aujourd’hui, ce creuset génétique est menacé par le pillage de l’homme, s’élève Catherine Peix, réalisatrice du superbe film « Les origines de la pomme » et érudite de la grande Histoire des pommiers. « Le pillage menace l’écosystème là-bas et menace nos pommiers locaux ici par l’introduction d’agents pathogènes auxquels ils ne sont pas résistants ». Merci les ours Contrairement à ce que l’on peut imaginer, les fruits de ces pommiers préhistoriques du Kazakhstan, dont certains s’élèvent jusqu’à 30 mètres de haut et vivent 300 ans, ne sont pas forcément petits et astringents. Les pommes sauvages délivrent souvent le parfum sucré du délice et arborent les couleurs variées de l’arc-en-ciel pour mieux se faire désirer des animaux dans les paysages montagneux du Tian Shan. Préservés depuis le tertiaire, ces arbres qui poussent à 2 000 mètres d’altitude sous des températures qui oscillent de + 40 ° C l’été à – 40 ° C l’hiver, « doivent leur particularité de produire des grosses pommes à la sélection naturelle pratiquée par les ours », explique Catherine Peix. Car avant d’hiberner, les grizzlis ont pour habitude de se gaver de nourriture pour constituer des…
Le grand voyage du pommier