Plus les Français réduisent leur budget consacré à l’alimentation, plus ils ont un avis sur la façon dont celle-ci doit être produite : plus de bien-être animal, moins d’élevage, moins de carbone ; sans parler des avis délivrés sur la façon dont devrait travailler l’agriculteur.
De l’avis à l’expertise, il n’y a d’ailleurs qu’un pas que le citoyen franchit sans difficulté, en un clic, quand il est invité à s’exprimer sur un sujet hautement scientifique, comme la distance d’épandage des pesticides. Comment un « Français ordinaire » peut-il être suffisamment éclairé pour répondre à une telle question quand des scientifiques, qui ont travaillé toute leur carrière sur le sujet, abordent le sujet avec nuance ? La question induite posée par cette consultation populaire ne portait en fait pas sur la distance de pulvérisation, mais bien sur la suppression ou non des pesticides. Un peu comme si l’on demandait : « Voulez-vous une centrale nucléaire dans votre jardin ? »
Les Français ne se sont d’ailleurs pas laissé abuser par l’absurdité de la consultation puisque seulement 53 000 personnes ont jugé nécessaire d’y consacrer du temps, soit à peine 2 personnes par commune française. Ce qui ne signifie nullement que tous les autres n’y portent aucun intérêt. Bien au contraire. Mais sans doute pensent-ils que cette consultation, qui s’est achevée le 1er octobre, n’est qu’un leurre destiné à détourner le regard de la vraie question ou à disculper un gouvernement trop souvent tremblant devant les lobbies économiques et sociaux quand il s’agit de trancher. Le cafouillage et le retard à l’allumage suite à l’incendie du site de Lubrizol, à Rouen, ont une nouvelle fois illustré cette crainte qui paralyse et dont le seul effet est de semer le doute.