200 000 €. C’est le coût des mesures de biosécurité prises par Thierry Marchal, à Sizun, pour éviter l’intrusion de pathogènes, notamment du virus de la peste porcine africaine.
L’abattage du troupeau laitier d’un voisin, lors de la crise de la vache folle (ESB), a marqué l’éleveur finistérien, intervenant à l’assemblée générale de l’OS Porc Bretagne. Dès l’annonce d’un cas de PPA en Belgique l’an dernier, il s’est focalisé sur la protection de son élevage (15 000 charcutiers produits dans l’année). « Je travaillais déjà sur la biosécurité mais, en 2019, je suis passé à la vitesse supérieure. » Plusieurs réunions avec ses quatre salariés, des échanges avec les techniciens et le vétérinaire du groupement, des rencontres avec des collèges éleveurs lors de la formation obligatoire (plan d’action national) lui ont permis de définir une stratégie.
« J’avais le choix entre instaurer des mesures contraignantes de biosécurité qui, à terme, n’auraient pas été suivies par les salariés, ou investir pour éviter ces contraintes. » Au final, un réaménagement des abords de l’élevage a été effectué et des pratiques ont été revues. Le parking est déplacé à l’extérieur de l’enceinte de l’élevage. Un local pour les visiteurs (intervenants) permet désormais de les recevoir en dehors de l’élevage. Le vestiaire est refait à neuf, avec six douches individuelles et un sas au-delà, pour enfiler les tenues et les bottes de l’élevage. Un bureau aménagé permet aux salariés de manger sur place à midi.
Digicodes
Pour éviter l’intrusion de matériel susceptible d’avoir séjourné dans un autre élevage, l’éleveur a investi : « Chacun des artisans qui interviennent à l’occasion dans l’élevage (techniciens de machine à soupe, d’équipement de lavage, électriciens ….) a sa caisse à outils spécifique, avec cadenas. » Un atelier a été installé à l’intérieur de l’élevage, « pour pouvoir travailler en totale autonomie. » En parallèle, des barrières facilitant le déplacement des hommes, du matériel et des animaux ont été installées, la cuve de gaz a été déplacée, tout comme le bac d’équarrissage. « Ces nouveaux aménagements nous permettent d’éloigner le risque de contamination. »
Un télescopique est totalement dédié à l’élevage et ne sort jamais de l’enceinte. Le transporteur de charcutiers est également mis à contribution : « Je livre par camion entier et je limite le nombre de départs de coches de réforme (30 par lot). Le chauffeur doit utiliser les bottes, la tenue et les panneaux spécifiques au quai d’embarcation. » Enfin, l’une des mesures essentielle : la clôture prochaine de l’élevage avec des plaques béton en partie basse surmontées d’1,5 mètre de grillage. Les portes seront sécurisées et munies de digicodes. Cette évolution, réalisée sous la pression sanitaire actuelle, a un coût : « 1 € par porc pendant 12 ans », indique l’éleveur qui entend profiter de la bonne conjoncture pour mettre son élevage à niveau…
Pas tous égaux
Une occasion unique de progresser
Thomas Berthe, Coordinateur national du Plan action prévention La biosécurité fonctionne bien, pour éviter la propagation du virus de la peste porcine africaine. On l’a vu en Belgique et en République Tchèque. Les mesures à prendre sont connues mais pas faciles à mettre en place. Nous devons changer nos habitudes. C’est un enjeu de filière qui ne souffre aucun maillon faible. Tous les intervenants, des fabricants d’aliments aux vétérinaires, sont impliqués. Les chasseurs sont mobilisés. Les voyageurs et les salariés étrangers qui travaillent dans nos industries ou dans nos élevages doivent être sensibilisés (pas d’importation de viande ou de charcuteries à leur retour). L’investissement dans la biosécurité aura un retour financier pour les éleveurs grâce à l’amélioration des résultats zootechniques. En travaillant contre le virus de la PPA, ils luttent contre l’ensemble des pathogènes. Une bonne santé est synonyme de bien-être animal, donc de bonne image pour l’image de la filière. C’est aussi une garantie d’accès au marché international.