Didier Guillaume lui-même a bien du mal à assumer le bilan pour le revenu des agriculteurs de la loi Égalim, un texte porté par son prédécesseur Stéphane Travers, et qui fut promulgué deux semaines après sa nomination. « Le compte n’y est pas, déclare à l’envi le ministre de l’Agriculture. Il n’est plus possible que les agriculteurs soient rémunérés à un prix inférieur à ce que cela leur revient. »
Sur le terrain, les effets de la loi se font attendre. C’est le cas de la première partie du texte, consacrée à la réforme des relations commerciales, et notamment de l’objectif de « construction des prix en marche avant ». La première cause est connue : le calendrier. L’intégration des coûts de production n’a pas pu se faire lors des négociations commerciales pour 2019, faute de temps suffisant pour les élaborer ou les diffuser. Mais la plupart des filières sont désormais dotées d’indicateurs de coût de production, même si quelques interprofessions (lait, vin) tardent à les publier formellement, par souci notamment de sécurité juridique. C’est le round de négociations commerciales entamé depuis octobre qui permettra de savoir, d’ici la fin de l’hiver, si les agriculteurs bénéficieront de la fin de la déflation amorcée en 2019 par la hausse du seuil de revente à perte (SRP) et l’encadrement des promotions.
On sait déjà que les effets de la réforme dépendront du taux de contractualisation dans les filières, de leur exposition aux marchés mondiaux et de la bonne volonté des acteurs. Car, rappelons-en la mécanique : les contrats devront être à l’initiative des producteurs ; ces contrats devront prendre en compte leurs coûts de production. L’aval de la filière devra ensuite les intégrer en cascade, jusqu’à la distribution. Pour les analystes, le bilan sera néanmoins difficile à tirer, même à l’issue des négociations commerciales…