La fièvre Q et la néosporose sont les maladies infectieuses les plus fréquentes à l’origine des avortements. Interview de Grégoire Kuntz, vétérinaire-conseil au GDS Bretagne.
La Bretagne a été leader pour proposer un suivi avortement aux éleveurs.
Grégoire Kuntz : La moitié des protocoles avortement au niveau national sont réalisés en Bretagne. Notre région s’est donné les moyens de mettre en place cette action, face à l’impact économique important que représente chaque avortement, que les études chiffrent à 500 € en élevage laitier. Grâce à cet outil, que nous avons mis en place en 2015 et qui a ensuite été étendu à d’autres départements, les enregistrements issus des déclarations des avortements réglementaires pour la brucellose déclenchent des alertes qui permettent de solliciter les éleveurs au protocole. Chaque vétérinaire sanitaire dispose de boîtes à prélèvement pour un suivi sécurisé et un tracé des échantillons, en quête d’une source potentielle infectieuse : BVD, Fièvre Q, néosporose, trois maladies conseillées au niveau national auxquelles le GDS Bretagne a proposé d’ajouter les mycoses, la listéria et la salmonellose. Cette dernière présentant une pression infectieuse importante en Bretagne de par la densité des élevages de volaille et de porc. S’il y a suspicion dès la première visite d’une autre maladie, l’analyse peut être plus ciblée.
Quelles sont les maladies les plus fréquentes ?
G. K. : On retrouve plus fréquemment en Bretagne la néosporose, ciblée dans 17 % des cas, et la fièvre Q (10 %), de manière constante depuis 3 ans de suivi des causes d’avortement. L’ehrlichiose est aussi de plus en plus fréquente. Mais n’allez pas croire que ces maladies sont plus fréquentes en Bretagne qu’ailleurs. On les trouve car on les cherche…
L’origine est-elle toujours d’origine infectieuse ?
G. K. : Non. Ce n’est pas parce que l’on cherche une origine infectieuse qu’elle est présente. Tout comme ce n’est pas parce qu’on prend la fièvre d’un animal qu’il a de la fièvre. Mais il faut passer par ces tests pour écarter ces hypothèses. On recherche donc les agents infectieux les plus probables, les agents pour lesquels nous disposons des techniques de dépistage et ceux pour lesquels on a des moyens de lutte. Par exemple, si la BHV4 est recherchée en Normandie, elle ne l’est pas en Bretagne. Son rôle reste controversé dans les avortements et nous n’avons à ce jour aucun moyen de prévention.
Seulement 40 % des analyses révèlent cette origine infectieuse. Les autres cas peuvent provenir de traumatismes, de chaleurs excessives, d’un trouble alimentaire (mycotoxines…), etc.
La détection de la cause abortive est importante.
G. K. : Si l’avortement est un signe clinique d’une maladie infectieuse, il faut y remédier afin de protéger les animaux, les intervenants sur l’élevage et les produits issus de ces animaux. Il faut aussi être conscient que certains épisodes d’avortements peuvent se calmer, n’incitant pas à suivre les recommandations données ni les moyens de biosécurité. C’est le cas typique de la fièvre Q. Si les conséquences ne sont pas visibles tout de suite, à la longue, des problèmes de reproduction peuvent apparaître comme la baisse de réussite en 1re IA…
Autre exemple, avec la salmonelle, des animaux sans aucun signe clinique peuvent être excréteurs. Mais l’agent présent dans l’environnement va provoquer des conséquences sur d’autres ateliers ; des veaux meurent, d’autres ont des problèmes pulmonaires… Sans compter que certaines maladies dépistées comme la fièvre Q, la leptospirose, la salmonellose et la listeria peuvent être des zoonoses, l’éleveur étant alors la première cible ! Les deux derniers agents peuvent aussi contaminer les produits au lait cru issus des vaches porteuses.
Le protocole que nous proposons n’est pas un outil de gestion de la reproduction, c’est avant tout un outil d’aide au diagnostic pour les vétérinaires, associé à une prise en charge des analyses et des prélèvements au tarif prophylaxie (70 % pour les adhérents du GDS Bretagne), le protocole de base total (prise de sang et analyse) pour détecter les maladies de 1re intention, s’élevant à 400 € minimum.