« Un changement des habitudes alimentaires est nécessaire »

 - Illustration « Un changement des habitudes alimentaires est nécessaire »
Philippe Pointereau, lors d’une table ronde organisée par la Fédération nationale de l’agriculture biologique.
Le secteur agroalimentaire devra réduire de moitié ses émissions de gaz à effet de serre.  L’élevage est dans le viseur car un régime carné contribuerait à l’élévation des températures.

Le secteur agricole est contributeur de Gaz à effet de serre (GES). Pour limiter l’augmentation des températures à 2 °C, il devra entamer une mue, selon Philippe Pointereau, directeur environnement de Solagro, intervenant à Vannes (56), devant des élus locaux et des responsables de collectivités. « De nombreuses solutions techniques émergent, cependant, elles ne pourront suffire sans que les régimes alimentaires soient modifiés et donc, les systèmes agricoles ». Il s’appuie sur une étude « Bionutrinet », pilotée par l’Inserm, qui apporte des preuves qu’un changement rapide des habitudes alimentaires est nécessaire. « Pour des raisons de climat mais aussi pour des raisons de santé publique et de biodiversité ». Les consommations alimentaires moyennes de 30 000 adultes français ont été évaluées.

Un régime bio, c’est 37 % de GES en moins

« Les émissions de gaz à effet de serre, l’occupation des sols et l’énergie nécessaire pour produire les régimes des participants ont aussi été évaluées, grâce à des analyses de cycle de vie des produits agricoles bruts ». Les résultats montrent que l’assiette qui contient au moins 70 % de produits bio a émis (pour sa production) 37 % de GES en moins qu’une assiette où les ingrédients sont conventionnels. Pourtant, il faut deux fois plus de surface pour produire un kilo de blé bio ; un poulet bio vit deux fois plus longtemps… « L’explication tient au fait que les consommateurs « bio » achètent moins de viande. Leur régime, moins riche en graisses, est plus végétal. Au final, leur assiette économise 24 % de surface ». En termes de santé, ce régime permet d’économiser 4 à 5 milliards d’euros annuels pour la Sécurité sociale, selon l’expert (obésité, infarctus…).

Acceptation sociétale

Bio ou pas, il faudrait réduire la consommation de produits animaux par deux en France. « Les politiques ne sont pas à la hauteur des enjeux. Mais il semble que le consommateur prenne de plus en plus ses responsabilités ». En Bretagne, une telle évolution aurait un impact sur l’élevage et sur les emplois. « Il ne s’agit pas d’éliminer les agriculteurs mais de les inciter à produire des protéines végétales, bio si possible, car la bio répond à tous les enjeux : climat, santé, biodiversité ». L’un des participants s’inquiète pour le bocage. « Diviser par deux le nombre de monogastriques n’aura aucune incidence ; ils ne sont pas dans le paysage. Par contre, une production laitière à l’herbe, sans soja importé, favorisera la biodiversité. Cela fait des années que les études économiques prouvent que les systèmes bovins sans intrants sont les plus rentables ». Le changement est possible, selon l’étude, à un prix acceptable pour le consommateur et en assurant une bonne qualité nutritionnelle. Les collectivités devront jouer le jeu, en sécurisant les productions locales par leurs achats. La transition vers un régime plus végétal devra cependant être acceptée par une large part de la population…


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