Frédéric Marchand crée des couteaux qui ont une âme : il forge la lame dans d’anciennes râpes de maréchal ferrant. Et, pour le manche, il redonne vie à du bois comme avec ce chêne provenant de tonneaux dans lesquels était conservé le vin sur les quais de Bercy à Paris en 1880.
Rien ne prédestinait Frédéric Marchand à devenir artisan coutelier. Il se rappelle tout de même : « Comme tous les enfants de ma génération, j’avais toujours un couteau dans ma poche quand j’allais jouer dehors pour tailler des branches d’arbres et en faire des flèches. » Il réalise ses études à l’école des Beaux-Arts de Poitiers et s’oriente vers une spécialisation en images de synthèse. Il débute sa vie professionnelle dans ce domaine puis rebondit dans une entreprise dans laquelle il passera 20 ans au poste de directeur commercial. « J’avais perdu le contact avec la matière alors que c’est cela qui me passionnait depuis le plus jeune âge », raconte Frédéric Marchand.
Un déclic en reprenant son arc
En 2004, il quitte l’Alsace avec sa famille pour s’installer à Noyal-sur-Vilaine puis à Châteaubourg en Bretagne. Ce sera le déclic : « On quittait un appartement pour une maison avec jardin et cela m’a donné l’occasion de me remettre au tir à l’arc. J’ai ensuite rapidement intégré le club du secteur. » En naviguant sur Internet et notamment en échangeant sur les forums spécialisés, il a créé ses propres équipements pour l’archer. « Je me suis mis à travailler le cuir, cela ne demande pas beaucoup de matériel. En suivant des tutos sur Internet, j’ai fabriqué des brassards de protection pour l’avant-bras mais aussi des carquois pour les flèches. » En poursuivant ses échanges sur les forums, il découvre le travail de l’acier et la coutellerie. Il investit alors 250 € pour acheter une forge à charbon et une enclume qu’il trouve dans une ferme du coin. « Entre 2006 et 2009, j’ai fait mon apprentissage tout seul et tous les week-ends je faisais mes gammes sans penser que j’allais en faire mon métier. » Les premiers couteaux forgés plaisent beaucoup aux membres du club de tir à l’arc. Et, avec la demande grandissante, il se lance dans le métier de coutelier en tant qu’auto-entrepreneur en parallèle de son emploi de directeur commercial.
Conserver le côté brut
À partir de 2009, il commence à participer à des salons pour présenter ses créations à une clientèle de connaisseurs. La mayonnaise prend, les clients appellent et les commandes tombent. « Cela fonctionnait tellement bien que je n’avais plus de jours de repos entre mon boulot de directeur commercial la semaine et la fabrication de couteaux le week-end et certains soirs. Il y a 2 ans, j’ai donc décidé de quitter mon travail pour me consacrer à 100 % à la coutellerie. » Il faut dire qu’un couteau fait par Frédéric Marchand ne ressemble à aucun autre couteau. En se formant tout seul, le coutelier n’a pas été influencé par le style de quelqu’un d’autre et il s’est forgé sa propre identité. « Il est très important d’avoir sa marque de fabrique pour pouvoir se différencier des autres. Une personne qui connaît mon travail va facilement reconnaître un de mes couteaux parmi les autres. J’aime conserver au maximum le côté brut de la matière que j’utilise pour fabriquer la lame ou le manche d’un couteau. Leur dos est légèrement courbé avec toujours la même géométrie sur le manche du couteau. La lame est signée à chaud d’une enclume en forme de M. »
Des matériaux avec une âme
Frédéric Marchand forge très souvent la lame de ses couteaux avec d’anciennes limes à métaux récupérées dans des vides-greniers ou avec des râpes de maréchal-ferrant. Des outils avec une histoire qui vont avoir une nouvelle vie. « Je conserve toujours une trace sur la lame de ce qu’elle était autrefois pour que l’on puisse se rappeler d’où elle vient. » Pour réaliser les manches de ses couteaux, le raisonnement est le même, il recherche des matériaux qui ont une âme. « Pour moi c’est très important de pouvoir raconter aux gens une histoire autour de chacun de mes couteaux, c’est aussi cela qui me différencie de mes confrères. »
En ce moment, le coutelier réalise quelques manches avec les anciennes planches en chêne qui bardaient son atelier depuis plus de 200 ans. Il utilise aussi du chêne provenant d’anciens tonneaux qui servaient à stocker du vin sur les quais de Bercy à Paris vers 1880. « Un ami a transformé ces anciens tonneaux de 22 000 litres en gîtes. Des ouvertures pour les fenêtres et les portes, j’ai récupéré les chutes pour en faire des manches. Je travaille aussi de l’os ou encore des bois de cerfs pour certains manches. » Pour l’artisan, un couteau doit tout d’abord couper, être esthétique tout en gardant un côté « roots », avoir une forme harmonieuse
et surtout raconter une histoire.
Contact
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frederic.marchand16@wanadoo.fr
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