L’expertise technique bretonne s’exporte en Russie

 - Illustration L’expertise technique bretonne s’exporte en Russie
Les unités de 2 500 truies sont monnaie courante en Russie, comme à la compagnie russe OOO "Korall" de 19 000 truies sur 4 sites de production.
Benoît Gaudin s’est installé comme technico-commercial et consultant porc dans la zone la plus productive de viande (porc, volaille) de Russie.

Voilà 8 ans et demi que Benoît Gaudin apporte son expertise technique dans la plus grande région agricole de Russie. Une région à l’image de la Bretagne pour la France, mais où les dimensions sont autres… À Belgorod, qui signifie « ville blanche » en russe, zone calcaire à la frontière ukrainienne située à 750 km au sud de Moscou, on retrouve par exemple la plus grosse holding russe en production porcine, Miratorg, avec 150 000 truies et 100 000 vaches allaitantes sur 840 000 ha de terre… Soit près d’1,5 département breton en surface ! « Cette holding représente bien le modèle industriel agricole russe, qui intègre la production, 3 à 4 usines d’aliments, des abattoirs avec 2,5 millions de porcs/an et des unités de transformation, des hypermarchés et même des restaurants », analyse cet expatrié de Corlay (22).

Des unités à 2 500 truies

« La plus grosse ferme dans laquelle j’interviens en tant que consultant compte 19 000 truies. C’est aujourd’hui un des meilleurs élevages de Russie avec 15,2 porcelets sevrés/truie et des porcs abattus à 173 jours entre 114 et 118 kg. » Cette unité se compose de 2 élevages de 7 500 truies et 2 autres blocs de 2 500 truies qui se mettent en route. Ces deux dernières représentent la taille des unités les plus rencontrées dans la région, mais on trouve aussi certaines structures avec 5 000, 7 500 ou 10 000 truies. « En travaillant sur l’alimentation en faisant venir un premix de France, l’organisation du travail et la formation du personnel, on a réussi à augmenter la production de 40 % en trois ans. » Et à diviser par deux la quantité d’antibiotique dans l’élevage.

Du gaz peu onéreux pour affronter la rigueur de l’hiver

Tout comme en Bretagne, la fertilité du sol permet aux structures de subvenir aux besoins des animaux. Mais avec un taux de chômage russe inférieur à 3 %, la main-d’œuvre fait défaut. Et la concurrence est rude : les holdings « s’arrachent » les spécialistes des unités porcines entre elles. À cela s’ajoute la complexité administrative russe… Même si elle a tendance à se simplifier, elle reste « 2 à 3 fois plus compliquée que la version française ! », ajoute-t-il. Avant d’insister : « Néanmoins, la plus grosse contrainte que nous rencontrons ici reste certainement la rigueur de l’hiver avec des températures qui oscillent entre -7 °C et – 20 °C, dont 15 jours par an en dessous de – 30 °C. La neige, qui peut être abondante, nous oblige à travailler avec un stock de 3 jours d’aliments. Pour pallier cette contrainte, si l’isolation est importante mais sans surcoût exceptionnel, les bâtiments sont chauffés avec du gaz en abondance et peu onéreux… »

Des mesures sanitaires strictes

Avec une densité d’élevages importante et la présence de la peste porcine africaine sur le territoire depuis 13 ans, les mesures sanitaires sont de mise. « Il ne faut pas croire que la Bretagne a la mainmise sur la rigueur sanitaire ! Ici, en Russie, le système est 100 fois plus respectueux de cette problématique… » La biosécurité est à chaque carrefour : chaque visiteur signe une décharge et assure qu’il n’a pas visité un autre élevage dans les 14 derniers jours. Un jour de « quarantaine » est nécessaire pour le passage d’un bloc engraissement à une maternité, 100 % des salariés et intervenants passent à la douche obligatoire et des cabines spéciales à deux portes avec une marche en avant se généralisent… Sans oublier le grillage tout autour des élevages, la désinfection des camions, même au sein d’une holding, l’efficacité du lavage vérifiée par le passage au luminomètre dans les camions de transport d’animaux en quête de matière fécale. Et la liste est loin d’être exhaustive.

« La Bretagne doit s’ouvrir au monde »

Les Bretons doivent arrêter de se prendre pour des champions et se regrouper pour s’ouvrir au monde, pour se développer. Sur le marché international, peu importe quelle structure bretonne fournit, elle est avant tout française ! Les guerres de chapelle font sourire les expatriés mais restent incompréhensibles pour les autres. De plus, travailler avec une entreprise française est toujours difficile car elle manque de réactivité. L’organisation pyramidale et le manque d’autonomie de décision de nos interlocuteurs font que nous attendons parfois 3 semaines une réponse quand d’autres pays répondent dans l’heure ou au plus sous 3 jours…Benoît Gaudin, gérant de Fransagro


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