Le consommateur a-t-il trop de choix ?

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Yves Puget, directeur rédaction LSA
La question de l’offre alimentaire et des circuits de distribution a été débattue lors d’une table ronde organisée par Terrena, la semaine dernière, à Nantes, avec des spécialistes du secteur.

Quelles sont les attentes des consommateurs ?

Catherine Giraud, directrice des achats Restoria* : Les repas sont de plus en plus déstructurés. La restauration rapide a le vent en poupe. Dans les grandes villes, on propose désormais des habitations sans cuisines (gain d’espace, d’argent). Paradoxalement, les émissions culinaires ont du succès en France. Il y a beaucoup de contradictions.

Pascal Claret, Système U : Les demandes évoluent rapidement ; les magasins de proximité, très réactifs, y répondent plus facilement, ce qui explique leur succès.

Yves Puget, directeur rédaction LSA* : La bio est une tendance de fond, lente, et sans retour en arrière.
Catherine Giraud : Nous assistons à une segmentation des besoins des clients. Les enfants, les collégiens et les personnes âgées n’ont pas les mêmes goûts, le même rythme de consommation. Nous nous adaptons.

Est-ce la fin des hypers ?

Yves Puget : On en parle depuis longtemps et ils résistent, avec toujours 52 % de parts de marché. Lidl et Leclerc ont conquis le plus de parts de marché l’an dernier, grâce à leurs politiques de prix. En fait, ce ne sont pas les formats qui meurent mais les enseignes. Tout dépend de l’emplacement géographique de ces grands magasins. Les Drive progressent légèrement mais ne sont pas toujours rentables. Les jeunes boudent les hypermarchés car ils en ont une mauvaise image mais commandent sur Uber Eats sans se poser de questions sur l’origine des produits ou le bien-être animal.

L’affichage « carbone » peut-il séduire le consommateur ?

Yves Puget : C’est toujours le pouvoir d’achat qui prime. L’affichage environnemental c’est bien mais je pense que le cumul d’informations sur les étiquettes perdra le consommateur. En plus, est-ce à des privés comme Yucca (application sur l’alimentation) de gérer ces informations ? Le développement des réseaux de distribution en circuits courts a eu le mérite d’interroger la grande distribution. C’est une niche mais avec un fort impact. Cette notion de circuit court est toutefois sujette à caution, car c’est le nombre d’intermédiaires qui compte (un seul) et pas le nombre de kilomètres.

Pascal Claret : Dans notre magasin, nous proposons à nos clients de rapporter les contenants car ils sont tous convaincus du bien-fondé de l’opération. Une personne sur 1 000 le fait…

Catherine Giraud : Certaines collectivités veulent du bio coûte que coûte. Résultat, nous achetons nos carottes bio, à certaines périodes, en Italie pour pouvoir fournir. Nous conseillons une autre approche de l’approvisionnement en produits bio (plus globale) mais ne sommes pas toujours entendus.

La réglementation est-elle trop sévère en France ?

Un agriculteur (présent dans la salle) : Tous les constructeurs mondiaux de voitures sont priés de se conformer aux mêmes règles concernant les émissions de CO2. Pour les produits agricoles, nous nous imposons des contraintes sur l’usage des antibiotiques, des pesticides, bientôt du carbone… Les pays étrangers n’y sont pas tenus et nos frontières sont ouvertes…

Pascal Claret : Les dates limite de consommation (DLC) sont pénalisantes sur le marché français. Pour les mêmes yaourts, il y a 14 jours de différence de DLC entre la France et l’Espagne.

La montée en gamme, une réalité ?

Un agriculteur : La montée en gamme ouvre la porte aux importations.

Pascal Claret : Nous ne vendons plus de poulets 1er prix. Nous avons un partenariat avec Terrena pour des volailles de qualité.

Catherine Giraud : La montée en gamme est inéluctable car inscrite dans la loi Égalim. La restauration collective aura besoin de volumes en bio, labels, signes de qualité locaux… Le personnel des cantines devra être accompagné ; un poulet élevé en plein air est plus difficile à désosser qu’un poulet standard, par exemple ; le temps de travail, ça compte…

Le repas végétarien en cantines va-t-il se répandre ?

Catherine Giraud : Nous devons proposer un menu végétarien une fois par semaine (loi Égalim). Nous n’avons aucun scrupule à élaborer des repas sans viandes. Nous veillons à ce que les substituts — soja, lentilles… — soient d’origine française.

*Restoria : enseigne de restauration collective ; 60 000 repas par jour. LSA : magasine de la consommation

Faut-il laisser le choix au consommateur ?

Selon Catherine Giraud, Restoria  : « L’importation de tomates en plein hiver nous heurte. Nous venons de prendre la décision de respecter la saisonnalité dès l’an prochain. Les clients (collectivités) qui en voudront devront s’approvisionner ailleurs. C’est notre engagement, après de vifs débats en interne, notamment avec nos propres commerciaux car ils vont peut-être vendre moins, dans un premier temps ».


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