Remettre en culture des terres en friche

 - Illustration Remettre en culture des terres en friche
Un gros travail est nécessaire pour défricher des terres qui n’ont pas été cultivées pour certaines depuis près de 20 ans.
Il existe une disposition très peu utilisée du Code rural qui permet à un agriculteur d’obtenir une autorisation d’exploiter valant bail rural sur des terres laissées à l’abandon par un propriétaire.

Quel agriculteur ne s’est pas dit un jour : c’est quand même dommage que ces parcelles restent en friche alors qu’elles sont juste à côté des miennes et qu’elles étaient cultivées par le passé. Emmanuel Le Cloître, responsable foncier et installation à la DDTM du Finistère, rappelle : « Tout propriétaire foncier est dans l’obligation d’entretenir ses terres. Nous avons à notre disposition un outil du Code rural qui permet de remettre en culture ou en valeur des terres incultes ou sous-exploitées. Cela peut être aussi bien des friches mais aussi des terres mal exploitées. »

Par exemple, les parcelles d’un agriculteur qui n’en assurerait pas l’entretien pourraient être considérées comme étant une parcelle sous-exploitée et faire l’objet d’une procédure de mise en valeur de terres incultes. Dans le cas des friches et de l’article L 125.1 du Code rural faisant état de terres incultes, il faut pouvoir prouver que la parcelle n’a pas été exploitée depuis au minimum 3 ans. « En faisant appliquer cette disposition du Code rural, de nombreuses parcelles incultes pourraient retourner à la production agricole dans le cadre d’installations de jeunes ou pour conforter des exploitations », insiste Emmanuel Le Cloître.

Un potentiel de reconquête de foncier

Dans le Finistère, le préfet a confié à la commission départementale de protection des espaces naturels agricoles et forestiers la réalisation d’un inventaire des friches départementales. « L’inventaire est presque terminé et il fait déjà état de 60 000 ha de terres qui seraient en friches. Cela concerne beaucoup de communes littorales mais pas uniquement. Nous prenons bien évidemment en compte l’aspect environnemental. Toutes ces terres ne seront donc pas remises en cultures. Nous constatons juste qu’il y a un potentiel de reconquête de foncier pouvant être orienté vers différents projets », explique Emmanuel Le Cloître. Ce foncier disponible avec une multitude de petites parcelles sur la zone littorale pourrait être orienté vers des projets d’installation en maraîchage, plantes aromatiques ou autre ne nécessitant pas de surface importante. « À terme, nous pouvons même imaginer que des porteurs de projet en recherche de foncier nous contactent pour que l’on puisse les aider dans le cadre d’une installation, d’un agrandissement ou encore pour conforter une exploitation. »

Contacter le propriétaire avant de lancer une procédure

Avant de se lancer dans cette procédure, il faut bien sûr contacter le propriétaire foncier pour lui proposer de lui louer ou d’acheter les terres. Faute d’accord et si le défaut d’entretien est manifeste, le demandeur peut alors engager une procédure à l’aide du formulaire en ligne (sur le site www.finistere.gouv.fr) et en le déposant au service économie agricole de la DDTM. « Cette procédure est conduite en lien avec le conseil départemental dans la mesure où le préfet saisit la commission départementale d’aménagement foncier (CDAF) qui va se déplacer sur le terrain en présence du propriétaire et du demandeur afin de constater que le fond est bien inculte ou sous-exploité. » Si la commission constate qu’il y a du potentiel agricole et agronomique, une délibération est alors envoyée au préfet qui notifie au propriétaire qu’une mise en valeur agricole est possible pour les terres.

« Deux choix sont alors possibles pour le propriétaire : défricher lui-même et mettre la parcelle en valeur ou renoncer et laisser le préfet autoriser un agriculteur pour une remise en culture. Si le propriétaire décide de remettre en valeur lui-même, il a un an pour le faire. Mais attention, un passage de gyrobroyeur n’est pas suffisant. Si le propriétaire ne répond pas au courrier de la préfecture sous deux mois c’est alors considéré comme une renonciation. » Ensuite un affichage se fait en mairie sur la commune et celles autour ; d’éventuels nouveaux candidats peuvent faire une demande pour les terres. L’étape suivante est le passage du dossier en CDOA et une autorisation d’exploiter est délivrée à une exploitation. « Cette autorisation vaut bail rural pour une durée de 9 ans. L’exploitant est alors légitime pour défricher les différentes parcelles. » Attention, il y a un bail, mais il est important ensuite d’aller définir les conditions de ce bail et notamment le loyer avec le propriétaire.

Maraîcher à plein temps grâce à l’application du Code rural

Depuis 2 ans, je produis des légumes dans une parcelle de 0,32 ha. Je vends mes tomates, salades, pommes de terre primeurs… aux particuliers lors de la période estivale. Le reste de l’année, j’enchaîne les petits boulots pour gagner ma vie. Sur Moëlan-sur-Mer, il y a beaucoup de terres en friches, je me suis donc renseigné afin de récupérer du foncier pour pouvoir exercer mon métier de maraîcher à plein temps. C’est là que j’ai découvert que l’application d’une disposition du Code rural permettait de récupérer des friches pour les remettre en culture. J’ai candidaté pour 3 ha en 30 parcelles appartenant à 80 propriétaires différents. Après avoir rencontré tout le monde sur une période d’un an et demi, je viens d’obtenir les autorisations d’exploiter. J’ai signé des baux de 9 ans avec tous les propriétaires. Ces terres n’ont pas été cultivées depuis plus de 20 ans, une ETA va passer plus de 10 jours pour défricher avec un broyeur forestier, ensuite un couvert sera semé. Je vais laisser le sol se restructurer pendant un an. En 2021, je pourrais semer mes premières cultures légumières. L’application de cette procédure permet de redonner des terres à des agriculteurs, facilite l’installation et incite les propriétaires à entretenir leurs parcelles.Julien Doineau, Maraîcher à Moélan-sur-Mer (29)


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4 commentaires

  1. Philippe

    Livi , serait il possible de lire l’analyse de terre qui dis trop pollué ? Merci et bon courage.

  2. Livi

    Cette disposition ne devrait pas exister. S’il est vrai que certains propriétaires ne s’occupent de leurs parcelles en les laissant en friches, je ne vois pas en quoi on permet a des personnes qui cherchent des terres afin de cultiver de pouvoir en profiter. Certes, il y a des démarches a effectuer, mais finalement, on met la pression au propriétaire.
    Si un agriculteur souhaite avoir plus de terre : qu’il achète. Déjà, ils sont nombreux à louer des terres qu’ils tuent avec leurs pesticides parce que « c’est trop fatigant et trop prenant » que de désherber de façon naturelle ». Ils viennent, ils sèment (lorsqu’ils ne laissent pas des cageots de plants sur la route, tombés du tracteur…), ils « pesticident », ils s’en vont… et quelques mois plus tard (sans revenir) ils récoltent. Non sans se plaindre des « lapins qui détruisent » leur récoltes. De plus, ils grappillent le moindre centimètre de surface, quitte a ratiboiser des talus de séparation, et à créer des problèmes avec des propriétaires habitant les terres jouxtant celles qu’ils exploitent. Oui, les talus ont un rôle (et bien plus d’un seul !). J’en connais même un qui déclare exploiter près de deux hectares en culture alors qu’ils les laissent en friches (mais reçoit les aides relatives à la prise en compte de ces derniers !). Il est même venu me trouver, énervé, lorsqu’il a appris que la délimitation terrienne serait remise en place afin que je m’occupe de cet espace (auparavant prêté a des amis pour leurs animaux)… c’est dire des cas qu’on peut trouver chez les agriculteurs actuels…
    Rares sont les agriculteurs véritablement respectueux de l’environnement. Et je sais de quoi je parle. Bien évidemment, tous ne sont pas ainsi et une nouvelle génération semble plus soucieuse de l’environnement. Mais la proportion reste infime.

    Alors, si un propriétaire – au pied du mur donc – loue ses terres à un agriculteur/maraîcher sans pouvoir poser ses conditions, puisque c’est le cas, il peut se retrouver avec des terres souillées et mortes, finalement (les fameux pesticides).
    Une amie de la famille loue ses terres a un agriculteur depuis plus de quarante ans. Et elle se désole de la façon dont elles sont exploitées car complétement polluées par tous ce que l’agriculteur (et son père avant lui) pulvérise à chaque fois. Mais elle n’a pas son mot à dire, non. Bah oui, elle n’est que la propriétaire voyons. Le locataire dispose de tous les droits. Ils n’ont jamais voulu acheter et elle n’a pas le droit de vendre (puisque terres agricoles) sans passer par une commission (et là, on connait les difficultés…). Des acheteurs étaient intéressés par une parcelle foncière afin de construire. Lorsqu’ils ont appris l’exploitation depuis des décennies : analyse du sol. Résultat : plus intéressés car trop polluée.
    Est-ce là ce à quoi doivent s’attendre les propriétaires ?

    Une terre en friche est un espace extrêmement vivant et riche en biodiversité. Bien plus profitable à la nature qu’une terre cultivée.
    Vu le pavé que je viens déjà d’écrire, j’arrête là. Mais il y a tellement à dire sur les agriculteurs (en général). Alors je ne suis pas contre eux, mais contre leurs façons de procéder et leur vision de l’agriculture. Et, encore une fois, certains font très bien leur travail, par amour, avec cœur et respect. Ils ne sont pas nombreux, mais de plus en plus peut-être.

    Alors récupérer du foncier, d’accord, mais peut-être d’une autre façon. Comme, par exemple, planter des arbres sur plusieurs parcelles, afin de remettre un peu d’arbres dans nos vies. Parce qu’un agriculteur, ça ratiboise absolument tout. C’est la mort.

    1. Chanson Rémy 71500

      bravo, nous sommes sur la même longueur d’ondes ! j’ai décrit ce genre d’agriculteur dans ma page, et je prouve catégoriquement que nous pourrions fonctionner mille fois mieux. voulez vous voir ce que je fais à https://www.facebook.com/cytharpe18/
      je suis là bas parce qu’il m’a été impossible de trouver un lopin en france.
      soit ils sont inaccessibles car suivi safer, soit ils sont enclavé entre une voie ferrée une autoroute et une usine chimique avec des ordures et des hydrocarbures partout, soit c’est vendu 5 fois trop cher sans autorisation de mettre un cabanon à outils…
      quand vous aurez vu et lu ma page, contactez moi, je cherche des gens comme vous.
      Rémy

    2. Edouard

      Oui Livi nous avons qu’à bouffer des arbres bien-sûr ! Pourquoi personne n’y a jamais pensé plus tôt !?

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