Le printemps est à l’heure. Grand soleil sur la Bretagne depuis le 21 mars. Le printemps est à l’heure, mais tout le monde rentre aux abris ! Sauf les vaches qui, dès cette semaine, sont sorties de leur long confinement hivernal en s’offrant une cavalcade de printemps dans les vertes pâtures. La chance ! Elles ont pris la clé des champs et leur patron a pris la clé pour s’enfermer à double tour.
Presque inconnu il y a encore six mois, le Covid-19 dicte sa loi de terreur sournoise. Les humains qui avaient cru pouvoir s’élever au-dessus de la nature redécouvrent qui est le maître dans la maison. L’illusion et les artifices d’une société hors-sol de béton et de pacotille se brisent sur les spikes d’un tout petit virus. Le doute des lendemains a resurgi dans nos vies 2.0 « risque zéro » ; chamboulant les priorités sur l’échelle des besoins vitaux.
En cette période de confinement, une chose reste essentielle : assurer son alimentation. Nous voilà presque revenus au temps des sociétés primitives qui passaient l’essentiel de leur temps à traquer le gibier et à cueillir l’engrain. Les longs trajets de jadis pour atteindre les généreuses plaines fertiles sont remplacés par les longues attentes devant les magasins pour faire main basse sur un chou-fleur Prince de Bretagne ou une boîte de pâté Hénaff. Après tant d’années de dénigrement – et peut-être pire encore : d’indifférence – les agriculteurs sont en passe d’être vénérés comme « saint Isidore le Laboureur » et applaudis comme les héros du milieu soignant. Phénomène durable ou épiphénomène de circonstance ? « A riskl ur wech tremenet, ar sant ‘zo prest disoñjet », dit ce proverbe breton riche de vécu : « Une fois le danger passé, le saint est vite oublié ».