Si le léger redressement du cours des commodités fin avril est un « signal positif », les économistes restent pessimistes concernant le prix du lait et prédisent l’intervention publique d’ici l’été.
En 15 jours, fin avril, les cours des commodités, « indicateurs importants de l’équilibre des marchés laitiers », se sont stabilisés après des semaines de chute marquée. Un rebond a même été constaté : 40 € / t sur la poudre maigre et 60 €/ t sur le beurre. « La dégringolade est-elle stoppée ? On l’espère… », concède, sans être dupe, Gérard You, économiste à l’Idele.
La poudre maigre flotte 210 € au-dessus de la limite de l’intervention fixée à 1 698 € / t. Le beurre, 440 € au-delà du déclenchement des mesures publiques… Mais ce « signal positif » ne peut cacher les surplus de lait ne trouvant pas de débouchés immédiats actuellement et stockés en beurre-poudre. En France, du lait aurait été échangé de gré à gré pour un prix entre 150 et 200 € / 1 000 L. Alors que l’Idele estime que le prix du lait valorisé en beurre-poudre tourne aujourd’hui autour de 220 € / 1 000 L. « Même si la Chine semble revenir aux achats, nous avons des inquiétudes concernant la solidité de la demande internationale. »
Propice à produire du lait à bas coût
Sur le début d’année, la production française était dynamique (+ 1,2 % par rapport à la même période en 2019) avec un cheptel pourtant en recul : « Une bonne productivité laitière portée par des fourrages de qualité et un prix incitatif ». Mais dès la semaine 14 (après le 30 mars), un ralentissement de la collecte a été observé. Est-ce le fait du dispositif de compensation financière porté par le Cniel pour dédommager les éleveurs baissant leurs livraisons de 2 à 5 % sur avril ? Est-ce le message de modération envoyé par certains transformateurs laitiers peinant à s’adapter au marché intérieur perturbé (fermeture de la RHD, changement d’habitudes de consommation des ménages…) et à un export en recul ? « Exceptée la communication très claire de coopératives de collecte qui ont de sérieux problèmes de débouchés, la plupart des laiteries ont envoyé un message prix, mais pas volume. » Alors, en période propice à produire du lait à bas coût, beaucoup d’éleveurs poursuivent sur leur lancée.
Sans pluie, l’herbe ralentit
Pour Gérard You, nul doute que le climat a beaucoup joué le mois passé. « Mars a été doux et très peu pluvieux. Début avril a été marqué par du vent du nord et des nuits fraîches… Sur des sols plus secs que la normale, la pousse de l’herbe a ralenti. » Mais ce léger coup de frein qui pourrait faire reculer la collecte française au niveau de celle du printemps de l’année dernière, « voire davantage », ne saura dissiper les inquiétudes. « Le prix du lait éleveur, stable en début d’année, va connaître un tassement », estime, avec regret, l’économiste.