En observant un ciel étoilé par une nuit sans lune, on a parfois l’impression d’embrasser l’univers. Bon, admettons-le : seulement une fraction de la Voie lactée. C’est-à-dire quasiment rien, corrigent les cosmologistes qui, en pointant leurs instruments vers les ténèbres insondables à l’œil nu, réduisent notre horizon de connaissance à une poussière d’étoile virevoltant dans l’infini. Humilité donc… Surtout quand ces mêmes astrophysiciens nous disent que l’univers observable serait en fait proche de zéro. Autrement dit, on ne connaît (presque) rien de notre monde.
Avec la crise du Covid-19, c’est parfois un peu le même sentiment qui émerge. Avec la même modestie que les cosmologistes, les professeurs de médecine les plus chevronnés reconnaissent la vacuité de leurs connaissances face à ce coronavirus. Voire leur impuissance. La même impuissance qui sidère l’agriculteur lorsque l’orage ravage le frais semis de maïs ; mais aussi, de façon heureuse quand, par une mystérieuse combinaison génétique, la vache la plus ordinaire produit l’élite improbable de la race. Deux exemples terre à terre qui montrent qu’il est difficile de tracer des plans sur la comète quand l’inconnu est incommensurablement plus vaste que les maigres parcelles du connu. Mais tout paysan sait que « tout est prévisible, sauf l’imprévisible, or seul l’imprévisible est important », et qu’il faut faire avec.
Visiblement certains « experts », qui n’ont généralement pour seule science que de prédire l’avenir en prolongeant le présent, semblent oublier ce précepte d’humilité face à l’inconnu. Qu’il leur plaise que le « monde nouveau d’après » ait les contours « de l’ancien monde d’avant » ou les aspérités incertaines de la rupture, à trop compter les étoiles ils finissent par se perdre dans les nuages.