Le début de récolte des artichauts en Bretagne a coïncidé avec la fin de campagne du bassin des Pyrénées-Orientales permettant d’assurer des prix rémunérateurs aux producteurs en ce début de récolte compensant la baisse des rendements liée aux conditions climatiques hivernales.
Depuis un peu plus de 3 semaines les débardeurs à artichaut (petite remorque automotrice) sont de sortie dans les champs annonçant ainsi le début de la campagne de récolte de ce légume emblématique de la zone côtière nord de la Bretagne. « Nous avons débuté la récolte dans les parcelles en 3e année de culture que l’on appelle aussi les vieux. Il nous reste environ trois semaines de récolte dans ces parcelles d’artichaut puis nous passerons sur les 2e année pour terminer par les 1re année vers la fin octobre », indique Christophe Moal, président de la section artichaut à l’UCPT (Union des Coopératives de Paimpol et de Tréguier) et producteur à Pleumeur-Gautier (22). Les producteurs bretons sont en pleine récolte des charnus qui sont les artichauts de variétés Camus, Castel et Cardinal.
Moins bon pour le petit violet
Le début de campagne de récolte s’accompagne d’un prix rémunérateur pour ces gros artichauts. « Nous sommes en moyenne entre 0,80 et 0,90 €/tête pour les calibres 15 et C15 qui sont les artichauts pesant respectivement 600 et 500 grammes de moyenne », précise Xavier Thépaut, chef produit artichaut à l’UCPT. Christophe Moal enchaîne : « Il nous faut un prix de 0,45 €/tête pour couvrir nos coûts de production. Il faut aussi rappeler que l’an dernier à la même époque nos artichauts étaient invendus donc on ne va pas s’emballer avec ce bon démarrage de campagne. La saison est encore longue. »
Les producteurs bretons sortent de plusieurs années de galère liées aux aléas climatiques, à la concurrence étrangère et du Sud de la France. Christian Bernard, président de la section artichaut chez Prince de Bretagne et producteur installé à Taulé (29), estime que « cette année, le calendrier se combine bien avec le bassin des Pyrénées-Orientales qui termine sa production. Les cours sont soutenus aujourd’hui. Concernant les petits violets, leur saison a démarré trop précocement du fait de l’hiver doux ». Ces artichauts petits violets n’ont pas trouvé leurs débouchés traditionnels en restauration, « nous avons toutefois réussi à sauver les meubles par la transformation. »
Freiner le recul des surfaces
Pour les artichauts globuleux, les rendements sont en dessous de la moyenne, les cultures ont souffert de conditions climatiques changeantes et de la pluviométrie excessive de cet hiver. « Avec une pluviométrie qui a été le double d’un hiver normal, certains plants se sont retrouvés asphyxiés. Et, avec moins de pieds à l’hectare, nous avons moins de rendement », constate Christophe Moal. Cette année, les cultures ont été épargnées par le gel. Il suffit d’une nuit de gel pour faire noircir les têtes d’artichaut, ce qui les rend invendables. Les vents d’est de mi-avril ont fait verser certaines parcelles d’artichaut rendant la récolte plus pénible. Christian Bernard ajoute : « Les feuilles ont frotté les têtes du fait des rafales de vent. Ces artichauts peuvent parfois être marqués, même s’ils sont toujours parfaitement consommables. »
Les producteurs ne manquent pas de rappeler que cette culture qui reste 3 ans en terre n’est récoltée qu’une fois par an et qu’un aléa climatique peut venir ruiner une année de travail. « Un hectare d’artichaut nécessite 300 heures de travail chaque année dont une grande partie est effectuée manuellement », précise Christophe Moal. La région Bretagne dispose d’une sole d’environ 5 000 ha consacrée à l’artichaut, toutes variétés confondues. Cette surface est en recul chaque année : par exemple, sur la zone UCPT, il y avait 1 032 ha de Camus en 2018 et il ne restait plus que 900 ha en 2019. « Il est important de freiner ce recul des surfaces. Si les producteurs se détournent de l’artichaut, ce sera au profit d’autres légumes et les marchés pourraient se déstabiliser », conclut Christian Bernard.
La consommation annuelle ne baisse pas On trouve aujourd’hui des artichauts quasiment toute l’année. Pour les grandes villes, nous avons adapté les conditionnements avec des colis 2 fois plus petits de 6 ou de 8 têtes, afin de répondre à la demande des petites surfaces de vente des centres-villes. La consommation totale française ne baisse pas en volume, mais la saison est plus étalée avec des produits espagnols ou italiens présents quand la production bretonne est terminée. Une grosse évolution est également à noter dans la mise en vente : nous avons décidé cette année et après discussion avec les producteurs de mettre en place des contrats. Les expéditeurs peuvent alors garantir une quantité et un prix à leurs clients. 15 à 25 % des volumes d’artichauts sont concernés, nous avons la volonté de limiter ce qui peut être contractualisé pour garder un marché au cadran vivant.Pierre Gélébart, Chef produit artichaut chez Prince de Bretagne
Nicolas Goualan et Fanch Paranthoën