Des cultes solaires millénaires occultés

 - Illustration Des cultes solaires millénaires occultés
Demain 20 juin, ce sera le solstice d’été. Ce jour de l’année – le plus court en nuit et le plus long en jour –, donnait lieu à de grands rituels festifs dans les sociétés antiques. La Saint-Jean en est l’appropriation chrétienne.

Au solstice de juin, le Soleil se couchera tard à la Pointe du Corsen, à Plouarzel (29), le point le plus à l’ouest de la Bretagne continentale. Précisément à 22 h 24. Soit un quart d’heure plus tard qu’au Pertre (35), à l’extrême est de la région. Mais que les Bretilliens ne se sentent pas lésés : la durée de jour qu’ils perdent le soir, ils la gagnent le matin. Car, si le solstice d’été est le jour où le Soleil se couche en son plus haut point au nord-ouest, c’est également le jour où l’astre de lumière se lève à son plus haut point au nord-est.

Tournés vers le Soleil

Le Soleil étant l’astre de la force vitale qui fait pousser les plantes et croître les animaux, il n’est pas étonnant que les peuples anciens célébraient le solstice d’été par de grands rituels festifs ; tout comme le solstice d’hiver qui annonce le renouveau du Soleil et la fin des jours noirs (les jours rallongent après le 21 décembre). Dans le cycle immuable des saisons, le Soleil a en effet le pouvoir d’allumer ou d’éteindre la vie. Il faut donc le vénérer comme il se doit, en signe de soumission des hommes à l’ordre de la nature et du cosmos.
En Occident, le culte solaire a connu son apogée au Néolithique, comme en témoignent les monuments de pierre de Carnac, de Stonehenge (Angleterre) et les multiples élévations mégalithiques qui jalonnent la campagne bretonne. Des édifices dont l’architecture est intimement liée aux calendriers solaires : solstices et équinoxes.

Les constructions religieuses chrétiennes, qui la plupart du temps ont été implantées sur ces lieux d’ancien culte païen (éminence, clairière, mégalithe, source), s’inscrivent dans cette coutume ancestrale qui consiste à orienter les édifices sacrés vers le soleil levant. La direction cosmique des chapelles, églises et cathédrales était à ce titre particulièrement bien respectée pour les édifices d’architecture romane construits au Moyen Âge. La tête de l’édifice doit regarder vers l’orient ; elle vise ainsi le soleil, la lumière. Cette règle de construction a été bien décrite au XIIIe siècle par l’évêque Guillaume Durant de Mende dans son « Manuel pour comprendre la signification symbolique des cathédrales et églises ».

[caption id= »attachment_46011″ align= »aligncenter » width= »650″] Au solstice d’été, les rayons de Soleil d’est plongent en plein chœur par les tympans de la maîtresse-vitre de la chapelle de Coadry du XIe siècle.[/caption]

Planter un mât et tracer un cercle

Pour implanter un édifice sacré, le bâtisseur plantait un mât (un gnomon) au lever du Soleil. La portée de l’ombre de ce mât définissait l’axe est-ouest. Puis, l’architecte traçait un cercle sur la circonférence duquel reposent les quatre piliers du vaisseau central qu’est la nef. Cette tradition architecturale est antérieure à l’ère chrétienne. Elle fut empruntée à Vitruve (un siècle av. J.-C.), auteur de l’ouvrage « Les dix Livres d’architecture » qui demeure encore une référence pour les bâtisseurs contemporains.

Ces règles de construction bien précises font que le jour du solstice d’été, les rayons du Soleil illuminent le chœur et tombent précisément sur l’autel consacré. Toute une symbolique chrétienne digne d’un temple solaire est en fait respectée : en franchissant le porche, le fidèle qui vient de l’occident – de la racine « cad », liée à l’idée de tomber, de chute, qui a donné cadavre, déchéance, etc. – s’avance vers la lumière, c’est-à-dire vers l’orient dont la racine « or » évoque l’idée de surgissement, de naissance. Rien n’est laissé au hasard…

[caption id= »attachment_46013″ align= »aligncenter » width= »720″] En pleine lumière du soleil levant, le site mégalithique Callanish en Écosse.[/caption]

Les saisons au sommet du clocher

En fait, les édifices religieux construits selon les règles des bâtisseurs du temps des cathédrales offrent une multitude de références au Soleil et au cosmos, exactement comme dans les cultes païens. Ainsi, le clocher s’inspire-t-il des colonnes primitives servant à mesurer la course du soleil du lever au coucher ; des sculptures directionnelles taillées dans la pierre apicale de la flèche désignent également les points cardinaux. Parfois, ces sculptures sont très élaborées et représentent des figures cosmiques qui marquent le mouvement des planètes dans le ciel et les saisons : le bœuf à l’ouest pour la constellation du Taureau et le solstice d’hiver ; le bélier à l’est pour l’équinoxe de printemps ; le lion au nord pour l’équinoxe d’automne ; l’aigle qui regarde l’astre de feu sans fermer les yeux est dirigé vers le sud pour le solstice d’été. 

Le coq annonce le lever du Soleil

En office de girouette, le coq, en tant que symbole solaire, annonce l’aurore qui dissipe les ténèbres. Chez les Grecs, le coq est aussi consacré à Hélios, le dieu du Soleil. Par ailleurs, le dimanche, jour du Seigneur, n’est-il pas le jour du Soleil, comme l’évoquent le « sunday » anglais et le « sonntag » allemand dont on retrouve, selon les linguistes, la trace de l’ancienne terminologie païenne dans les anciennes langues germaniques.


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