La vache Hereford est confidentielle en Bretagne. À Vern-sur-Seiche (35), Didier Gallet s’est passionné pour cette race d’origine anglaise qui a conquis le monde… mais peu la France.
Elle est l’emblème des troupeaux des grandes plaines américaines, menés par les cow-boys des westerns. Ce qui vaut sans doute à la Hereford, encore aujourd’hui, d’être la vache des doubles-actifs qui jouent simultanément sur les deux tableaux de l’équin et du bovin. Didier Gallet est de ceux-là. Sur sa ferme d’une cinquantaine d’hectares d’un seul bloc, qu’il gère avec son épouse Stéphanie, cohabitent deux ateliers : une pension d’une cinquantaine de chevaux – nous sommes à un quart d’heure du centre de Rennes – et un troupeau allaitant d’une trentaine de vaches Hereford et la suite.
[caption id= »attachment_46594″ align= »aligncenter » width= »720″] Didier Gallet : « Depuis que j’ai changé de race, j’ai changé de métier ».[/caption]
La force tranquille
En cette journée de début juillet, le troupeau de vaches suitées se tient serré au soleil, au milieu d’une prairie vallonnée cerclée par le Bois de Soeuvres. Paisibles. « C’est une de ses grandes qualités. C’est une vache douce, jamais agressive », démontre Didier Gallet en caressant ses préférées les unes après les autres. « Depuis que j’ai changé de race, j’ai changé de métier. La Hereford m’a libéré du temps et amélioré ma qualité de travail. Les vêlages sont faciles et les vaches sont maternelles. La contrainte de l’écornage a disparu puisque la race à la particularité d’avoir un rameau polled (sans cornes) », raconte celui qui élevait auparavant « une race plus tonique ». « Elle est très docile, un peu comme une Normande. Même les taureaux sont tranquilles, c’est pourquoi des laitiers l’utilisent ; ils passent même parfois dans la salle de traite », rigole l’éleveur qui apprécie pleinement cette placidité pour le bouclage des veaux. Ce caractère est également apprécié par Didier et Stéphanie Gallet qui doivent composer avec les propriétaires des chevaux qui ne se refusent pas le plaisir d’aller caresser les petits veaux. « Avec la Hereford, on se sent en sécurité ».
[caption id= »attachment_46595″ align= »aligncenter » width= »720″] Exception dans le troupeau, une vache avec 2 cornes « en roue de vélo », qui a bien 4 pattes…[/caption]
Une herbagère rustique durable
« Grande brouteuse », comme la décrit Pascal Bastien, le président de l’association nationale de la race, la Hereford se contente d’herbe. « C’est une vache herbagère, durable par définition car, avec cette faculté de bien valoriser les prairies, elle participe au maintien de la biodiversité et au piégeage du carbone ». « Rustique », ajoute l’éleveur d’Ille-et-Vilaine. « C’est une race qui valorise très bien le fourrage grossier. En hiver, une ration à base de foin, d’enrubannage et de paille suffit à maintenir la production et l’état de cette vache qui s’engraisse facilement ». D’où un coût alimentaire réduit, avec en corollaire de meilleures marges, puisque même la finition peut se faire à l’herbe. « Certes, les carcasses sont plus légères que les races allaitantes françaises spécialisées : compter 430-450 kg pour un bœuf de 30 mois ; 330-370 kg pour une vache de réforme ». Pour autant, un jeune bovin conduit de façon classique à l’auge atteindra ses 380 à 420 kg de carcasse à 20 mois, voire 450 kg à 18 mois en système très intensif. « En femelle, vous atteignez sans problème des GMQ de 1 à 1,2 kg à l’herbe », complète Pascal Bastien.
Réputée pour sa précocité, la Hereford peut vêler à 24 mois. Sous réserve que la génisse pèse 450 kg à la mise à la reproduction. Sans quoi sa croissance sera freinée car il s’agit d’une bonne laitière. « En Hereford, vous obtenez en moyenne des croissances sous la mère de 800 à 1 400 g selon l’alimentation et le potentiel laitier de la vache », situe Didier Gallet très à cheval sur la génétique. « Dans notre troupeau, il y a deux souches : une anglaise de type mixte-élevage ; une canadienne, plus volumineuse et plus massive ».
Maturation jusqu’à 100 jours
L’autre qualité de la race s’apprécie dans l’assiette. Avec comme marque de fabrique : un gras de couverture qui autorise des durées de maturation jusqu’à 100 jours pour une meilleure expression des saveurs que savent reconnaître les amateurs. Sans oublier le persillé « exceptionnel » couplé à une viande bien rouge qui ouvre l’appétit pour une viande tendre. « La Hereford est recherchée par les grandes boucheries parisiennes et lyonnaises d’autant qu’elle permet de découper des portions plus petites, en phase avec la demande actuelle des consommateurs », observe l’éleveur de Vern-sur-Seiche qui pratique la vente directe.
Pour mieux faire connaître les qualités de la viande Hereford, l’association des éleveurs français vient de déposer une marque qui sera dévoilée à la fin de l’été. Une signature de qualité pour les gourmets. Mais il n’y en aura pas pour tout le monde car, pour l’instant, le cheptel reproducteur français se limite à 1 500 vaches…