Le blé se situe depuis toujours au cœur de l’Histoire et des jeux de puissance. Durant l’Antiquité, les guerres détruisaient les cultures ; ce qui valu au commerce du blé de se développer pour garantir l’approvisionnement des villes. Au terme d’alliances et de traités, des routes maritimes se sont alors progressivement mises en place pour sécuriser les « coffres à blé » des pays. Au XIIe siècle, l’Ordre des Templiers, détenteur d’imposants domaines agricoles, régnait en seigneur sur les greniers et la finance. Un Ordre devenu si puissant à l’époque qu’il est considéré par les historiens contemporains comme la première multinationale de l’histoire. Reste que son démantèlement ne se traduisit pas par un mieux-être pour le peuple. En 1307, quand le roi, Philippe le Bel brûlait sur un bûcher le grand maître Jacques de Molay, le blé ne se faisait pas plus abondant et le pain s’était enchéri. Faux procès, vrai enjeu de pouvoir…
Sept siècles plus tard, les céréales demeurent ce même instrument de pouvoir. Le 10 décembre, en recevant le Prix Nobel de la paix, le directeur exécutif du Programme alimentaire mondial de l’Onu, David Breasley, s’est alarmé, qu’en 2020, le monde n’utilise pas davantage sa richesse pour empêcher les famines. « Même au plus fort de la pandémie de Covid, en seulement 90 jours, 2 700 milliards de dollars de richesse supplémentaires ont été créés. Et nous n’avons besoin que de 5 milliards de dollars pour sauver 30 millions de vies de la famine. Est-ce que quelque chose m’échappe ? », a-t-il mimé de s’étonner. Et de prévenir : « En raison des nombreuses guerres, du changement climatique, de l’utilisation généralisée de la faim comme arme politique et militaire, 270 millions de personnes s’acheminent vers la famine ».