Depuis 1982, Dominique Coude transforme le cidre en eau-de-vie en sillonnant les routes bretonnes avec son alambic ambulant datant de 1971 : une activité créée par son grand-père et que son fils devrait poursuivre après lui.
La température ne dépasse pas 5 °C en ce tout début de matinée du 5 février et un épais brouillard recouvre la campagne de la commune de Paimpont (35). Dominique Coude, bouilleur ambulant, a installé son alambic juste devant un bar restaurant fermé à cause de la crise sanitaire actuelle. « D’habitude, je ne me pose pas à cet endroit mais des travaux sur une route communale m’ont contraint à changer d’emplacement. J’espère que mes clients vont quand même me trouver », lance Dominique Coude en se servant un café chaud directement sorti de sa thermos. Et non le bouilleur ambulant ne carbure pas à l’eau-de-vie sinon il perd rapidement son permis de conduire et sa carrière risque d’être plus courte que prévu.
[caption id= »attachment_52851″ align= »aligncenter » width= »720″] Chaque client apporte son bois pour alimenter le foyer de l’alambic.[/caption]
Sept mois par an sur la route
Dominique qui souhaitait devenir comptable s’est retrouvé à la tête de la ferme, de l’entreprise de travaux agricoles (ETA) et de l’activité de distillation suite au décès accidentel de son père en 1982. « J’étais l’aîné de la famille et il fallait bien assurer le boulot. J’ai rapidement décidé d’arrêter l’ETA pour me consacrer pleinement aux deux autres métiers. » C’est son arrière-grand-père qui avait démarré la distillation ambulante en 1929. Et l’histoire n’est pas terminée car Laeouenann, le fils de Dominique âgé de 18 ans compte bien poursuivre cette activité familiale. « J’exerce ce métier pendant sept mois de l’année, je navigue entre le Morbihan, les Côtes d’Armor, l’Ille-et-Vilaine et la Loire-Atlantique. » À bord de son petit camion benne, il tracte son alambic de 3,5 tonnes datant de 1971 de commune en commune. Le bouilleur se met en place le matin au moins une heure avant l’arrivée du premier client pour démarrer son feu de bois indispensable pour assurer la distillation du cidre breton.
Les clients fournissent le bois
Une fois le feu démarré ce sont les clients qui vont s’en occuper toute la journée. En effet chacun vient avec quelques bûches pour alimenter le foyer, ça évite au bouilleur de transporter une grosse quantité de bois avec lui. L’opération démarre par le transfert du cidre vers l’alambic en cuivre. « Je peux passer une vingtaine de barriques de 220 litres de cidre chaque jour », précise Dominique Coude. Le cidre est alors chauffé à 90 °C. L’alcool, qui devient volatil à partir de 60 °C, passe dans une colonne de rectification pour trier ce que le bouilleur appelle « les petites eaux ». Les vapeurs d’alcool se dirigent alors dans un serpentin pour être refroidies et récupérer le précieux breuvage. « L’eau-de-vie est tirée entre 50 et 55° d’alcool, mais on peut aussi la tirer entre 65 et 70 °. Il faut alors la couper avec de l’eau pour la faire redescendre. Une barrique de 220 litres de cidre va donner 10 litres d’alcool pur. » Une partie des clients de Dominique sont des agriculteurs installés avant 1960 et qui possèdent encore un verger ce qui leur donne le droit de distiller 20 litres d’eau-de-vie à 50 °, chaque année, sans payer de taxe à l’État.
Une ambiance conviviale
Ce jour-là, à Paimpont, les clients sont pour la plupart des personnes récoltantes pouvant justifier qu’elles possèdent un terrain avec des arbres fruitiers ce qui leur permet de distiller l’équivalent d’une barrique de 220 litres de cidre pour obtenir 10 L d’eau-de-vie pure soit 20 L à 50° sur lesquelles elles ne paieront que 50 % des taxes, soit 90 € au lieu de 180 €.
L’ambiance est conviviale au pied de l’alambic. Pour se réchauffer, il est possible de se rapprocher du foyer. Ça discute plantation de pommiers, variétés mises chez les uns et les autres, pressage des pommes… Très régulièrement Dominique Coude se rapproche de l’alambic pour toucher un tuyau en cuivre. « Cela me permet de vérifier la température et de modifier la vitesse de descente du cidre si besoin. » Les deux derniers clients de la matinée arriveront à 11 h 30. Après avoir transféré leur cidre dans l’alambic et alimenté le foyer avec du bois, ils débouchent une bouteille de rosé et offrent un verre aux personnes encore présentes. « C’est aussi pour ces petits moments conviviaux que j’aime mon métier », conclut le bouilleur ambulant.
Contact : Dominique Coude
06.07.61.02.45 / dominique.coude0842@orange.fr