Élevés sans antibiotiques, nourris avec des céréales cultivées sans pesticides, bio, les porcs de la Cooperl, vendus sous marque Brocéliande, se démarquent pour répondre aux attentes sociétales.
80 % des mâles produits par les adhérents de la Cooperl sont entiers. Seul le cahier des charges de la production sous label empêche le groupement de cesser totalement la castration. « C’est un sujet du passé », estime Bertrand Convers, responsable environnement de la structure. Plus de 5 € de gain par mâle pour les éleveurs et des produits qui s’écoulent sans problème d’odeurs. Une vingtaine de nez humains y veillent, à raison de 2 heures par jour chacun, par séquences de 15 minutes. La technologie n’a, à ce jour, rien d’aussi fiable à proposer. « Nous enregistrons désormais moins de 1 % de carcasses odorantes ». Les travaux sur la génétique mâle et l’alimentation paient. Au rayon du bien-être animal, le groupement travaille aussi sur la coupe des queues. Une quinzaine d’élevages testent des solutions alimentaires et de confort. Rien de probant dans l’immédiat même si le groupement assure enregistrer des progrès. 37 % des éleveurs n’épointent plus les dents des porcelets. Le service en charge du bien-être animal au groupement va être renforcé par un éthologue et un spécialiste de la caudectomie.
50 % élevés sans antibiotiques
L’arrêt de la castration a facilité l’essor de l’élevage sans antibiotiques. 220 éleveurs sont engagés dans le zéro antibiotique dès la naissance ; 600 après sevrage. « En 2021, la moitié des animaux respecteront l’un de ces deux cahiers des charges ». Le groupement a été accusé de troubler le consommateur avec ce signe de qualité. « Il faut de la pédagogie », répond Thierry du Teilleul, responsable du développement de la marque Brocéliande. « C’est un enjeu de santé publique. Douze mille décès sont liés à l’antibiorésistance en France chaque année ». Dans les rayons, le prix de vente du jambon et des lardons est de 10 à 15 % supérieur. « C’est pourtant un succès. Nous attendons une augmentation de 30 % du chiffre d’affaires en libre-service cette année ». Une réussite que le groupement espère pour le bio. 25 éleveurs se sont engagés dans l’élevage de porcs biologiques ; la production a doublé en deux ans et représente désormais 20 % de la production française.
Le défi est de valoriser l’ensemble de la carcasse en bio, en incitant le consommateur à acheter d’autres pièces que le jambon. Les éleveurs bénéficient d’un prix garanti pendant 5 ans, de 8 % supérieur aux cours. Les débouchés sont contractualisés sur dix ans.
10 000 hectares sans pesticides
Une centaine d’adhérents se sont engagés à produire 5 à 10 hectares de céréales sans pesticides. Les 800 hectares cultivés en 2021 seront vite dépassés. La Cooperl prévoit de tripler cette surface dès l’an prochain. Les fongicides sont remplacés par des produits de bio-contrôle (champignons), des biostimulants (extraits d’algues) et grâce à un retour aux bases agronomiques (couverts, rotations). « La perte de rendement est de 2 à 3 q par hectare », assure Gildas Le Fessant, en charge du suivi de cette production alternative. « Les éleveurs ne reviennent pas en arrière ; ils sont motivés. En 2025, nous envisageons la production sans pesticides de 10 000 hectares ». Pour le groupement, il s’agit d’une opportunité pour communiquer avec la société civile. L’alternative a un coût. Les producteurs ont une bonification de 47 €/tonne pour les céréales et 1 ct du kilo pour les porcs nourris aux céréales « zéro pesticides ». Une dizaine d’exploitations adhérentes sont parallèlement certifiées Haute valeur environnementale (HVE), une qualification qui concerne la ferme dans sa globalité.
Du rose au gris
Brocéliande mise aussi sur le « sans nitrites » qui suppose une date limite de consommation plus courte (de 21 à 13 jours). « Cela nous oblige à fabriquer tous les jours, en plus petites quantités ». L’appellation « Gris, bien élevés » devra faire ses preuves dans les rayons. La couleur rose, associée à la présence de nitrites, étant toujours appréciée de la clientèle. Lardons, jambons et rôtis sont concernés. Toutes les alternatives développées par la Cooperl demandent une forte adhésion des consommateurs. Le numéro 1 du porc français a gagné son pari de la non-castration, est en passe de gagner celui du sans antibiotiques ; il devra communiquer sans relâche pour vendre le concept du sans pesticides dans un océan de signes de qualité. La bonification pour l’éleveur-cultivateur adhérent est à ce prix.
Essentiel pour attirer des jeunes dans le métier J’encourage les éleveurs à s’engager dans ces voies alternatives. Nous devons nous ouvrir à la société civile, répondre à leur demande, pour attirer des jeunes, agriculteurs ou salariés, et assurer le renouvellement des générations. Les jeunes ne viendront que si leur métier est accepté par la société, si l’image est bonne. Nous les accompagnons par des prix plus rémunérateurs, dans toutes nos productions alternatives. Nous devons sortir de la spirale du moins-disant, innover sans cesse pour aller plus vite que nos concurrents, reconquérir des segments de marché. Il y a dix ans, le porc bio était importé… Nos services accompagnent cette montée en gamme qui procure des bénéfices moraux et environnementaux. Les éleveurs sont demandeurs et fiers du travail accompli. Patrice Drillet, Président de Cooperl