Les terrasses s’ouvrent : c’est l’économie qui redémarre. Le monde se déconfine : la croissance va rebondir. L’urgence est climatique : la transition énergétique est en marche. La souveraineté alimentaire est menacée : organisons un « Grand rendez-vous ». Notre société est reine en matière de rhétorique, cet art de persuader par la parole. Une rhétorique qui flirte souvent avec la tromperie intellectuelle. À ce jeu-là, l’effondrement du PIB de la France de 8,1 % en 2020 devient dérisoire puisque les ménages vont se ruer sur la consommation : l’assaut des terrasses de cafés en deviendrait une nouvelle théorie économique. Et quid des milliards injectés dans le pays qui devront être remboursés. Enfin, peut-être… À moins que les nombreuses bulles financières gonflées à bloc par cet afflux inédit de monnaie ne se volatilisent du jour au lendemain et ne fassent table rase « d’une dette qui n’en est pas une », nous expliquent des économistes. Rhétorique encore alors que l’impératif de reprise piétine l’urgence climatique. Et pourtant. L’année 2021 devrait être une des pires en matière d’émissions de gaz à effet de serre selon le rapport annuel « Global Energy Review » publié le 20 avril dernier. Il s’agirait de la deuxième augmentation la plus forte de l’histoire. La demande en énergie fossile est annoncée à + 4,5 % supérieure à ce qu’elle était en 2019. Vite, une Cop 26 pour prendre des engagements plus ambitieux ! Rhétorique toujours… Pas de doute qu’il y a 70 ans, Henri Queuille, 14 fois ministre de l’Agriculture et pionnier dans la préservation de la nature, aurait usé de sa formule qui a fait date : « Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent ». Et Edgar Faure lui aurait répondu par inimité habituelle : « L’immobilisme est en marche, rien ne pourra l’arrêter. »…
Rhétorique