L’envolée du prix des engrais azotés rappelle, s’il le fallait, le cercle vertueux du couple élevage-culture. À 630 € la tonne d’ammonitrate, fumier et lisier prennent de la valeur. Les anciens connaissaient trop bien cette richesse indigène comme l’évoque le dicton breton : « Teill a grogadou ; segal a bochadou (Fumier à pleines fourches ; seigle à pleins sacs) ». Au printemps prochain, heureux les agriculteurs qui disposeront de lisier pour fertiliser leurs céréales, de fumier pour leurs cultures de printemps. Car à près de 2 € l’unité d’azote minéral, la facture représentera de 400 à 500 €/ha de blé, soit l’équivalent de 2-2,5 t/ha de céréales. Trois fois plus cher qu’il y a un an. Et cela à condition que le prix de l’azote n’augmente pas d’ici là. Ou, plus problématique encore : qu’il y ait suffisamment d’engrais disponible. Ce qui n’est pas assuré. La végétalisation de l’agriculture touche là une de ses limites dans un monde où l’énergie est chère et sera durablement coûteuse annoncent les économistes. Dans ce contexte d’insuffisance de l’offre planétaire, ces derniers expliquent que l’équilibre se fera par « une destruction de la demande d’énergie » . Elle concernera d’abord les industries les plus gourmandes ; typiquement la fabrication d’engrais azotés qui nécessite l’équivalent d’un litre d’énergie fossile pour fabriquer une unité fertilisante. Et comme une difficulté ne vient jamais seule, la hausse du coût du fret pèse aussi sur les prix. Tout comme la parité euro-dollar qui joue en défaveur des engrais azotés importés. À moyen terme, le mécanisme bruxellois d’ajustement carbone aux frontières à partir de 2026, dispositif qui se cumule au marché carbone, pourrait participer lui aussi à transformer le grain blanc en bille d’or……
Cher azote