La libre circulation des marchandises est l’une des quatre libertés fondamentales de la construction européenne. Par contre, la « préférence communautaire » souvent invoquée dans les échanges agricoles n’est pas un principe fondateur ; elle est une valeur politique commune mais ne figure pas dans le traité de Rome instituant la CEE. Tout au plus le traité d’Amsterdam (1997) mentionne-t-il une « préférence naturelle » entre les États membres. Une précision somme toute inutile puisque logique quand plusieurs pays décident de faire union. Une alliance solide ne peut être en effet construite sur le sable de son propre intérêt. Tous les pays engagés dans l’Union européenne devraient être éclairés de ce principe du serment mutuel scellé par tous les groupes humains qui partagent le même idéal et œuvrent à le défendre collectivement. Certes, les membres de l’UE peuvent toujours prétexter que Bruxelles n’a pas assuré le « régime garantissant une concurrence non faussée entre les États » qu’elle promettait. Une faille dans laquelle s’engouffrent aujourd’hui comme un seul homme des pays entiers, des lobbies, des communautés, des individus, etc. gagnés par un surprenant souverainisme à l’heure où de puissants blocs antagonistes se constituent sur la planète. Les initiatives qui invitent à acheter français quand on est en France, allemand quand on habite Berlin, breton quand on est Breton, du Poher quand on est carhaisien… et pourquoi pas de Kerfuric quand on habite Kerfuric, participent, à leur niveau, à ce repli. À ce jeu de la préférence… pour soi-même, que restera-t-il de l’Europe construite sur l’idée que la richesse naît de l’échange et de l’entraide entre les peuples ? Que restera-t-il de l’Europe grand marché pour les produits agricoles bretons ?…
Préférence