Des possibilités existent pour développer l’offre issue des Jeunes bovins (JB) sur le marché français, mais une enquête auprès de la filière montre que l’export reste fondamental pour une bonne valorisation des arrières notamment.
Si les cours des JB retrouvent cette année des couleurs, ce type de production bovine a souffert d’un manque de rentabilité pendant plusieurs années. « Sur l’ensemble de l’année 2020, les prix ont été catastrophiques notamment du fait de la crise sanitaire et des difficultés à l’export », a souligné Mathieu Repplinger (Interbev) lors de la conférence Grand Angle Viande le 9 novembre. C’est pourquoi la filière a souhaité que soit menée l’étude « Où va le JB ? » pour « mieux comprendre la logique de valorisation d’une carcasse. Nous voulions aussi connaître les forces et faiblesses de l’offre française et identifier des pistes de développement sur le marché français. »
Complémentarité des débouchés
Une enquête a été menée au printemps dernier auprès de 5 groupes d’abattage, de 2 GMS, d’1 transformateur, d’opérateurs en RHD (restauration hors domicile) et d’importateurs. « 50 % des tonnages de JB abattus sont destinés à l’export et 50 % restent sur le marché français. Alors qu’en JB viande l’export absorbe 54 % des tonnages, la part de JB laitiers restant sur le marché français est plus importante, à 74 % », chiffre Caroline Monniot (Geb – Idele). Les opérateurs font remarquer que « c’est la complémentarité des débouchés qui permet de valoriser au mieux les carcasses. »
Les volumes abattus destinés au marché français sont majoritairement commercialisés sous forme de viande transformée (haché, plats préparés) ou désossée. « Toutefois, les JB viande sont encore beaucoup vendus en demi-carcasses, quartiers et 8e arrière pour les boucheries et GMS. » À l’export, la part des tonnages de JB valorisés avec os est plus importante. Les quartiers avant vont majoritairement sur le marché grec, les arrières sur le marché italien et le désossé sur le marché allemand. Le globe est orienté vers l’Italie et l’Allemagne principalement, le rumsteck reste sur le marché français.
« Les importateurs apprécient la viande de JB française pour sa qualité et son homogénéité. Les races à viande françaises sont connues et appréciées et la viande claire et maigre répond au goût des consommateurs », commente Caroline Monniot. En 2020, la France a exporté 201 000 t équivalent carcasse de viande bovine : de la viande de JB pour plus de 80 %. Achetant 31 % des volumes exportés, l’Italie reste notre 1er client. La viande française y est vendue en GMS en complément des bovins nés en France engraissés dans le pays. Mais la concurrence de la viande polonaise, espagnole et irlandaise y est croissante et les exportations baissent tout comme en Grèce, 3e client français avec 20 % des volumes. La Pologne et l’Espagne y sont de gros concurrents.
Marché en croissance sur l’Allemagne
Le recul des exportations en Europe du sud a toutefois été compensé par l’augmentation des envois vers l’Allemagne (23 % des volumes). « La demande allemande devrait se maintenir du fait du déclin de l’engraissement et du transfert de consommation entre viandes, avec moins de porc et davantage de bœuf. Mais les opérateurs devront répondre aux exigences de ce marché tels que la garantie sans OGM et le bien-être animal. » Sur le nord de l’Europe, là aussi des normes sont exigées sur la production bovine (limitation du nombre d’animaux par case, pâturage, transport des animaux…).
Dans notre pays, le JB pourrait répondre à la demande croissante de l’origine France. « La couleur claire ne semble pas être un problème pour le consommateur, même si en GMS, la viande de femelle est préférée par la majorité des enseignes. » Les boucheries halal sont le débouché phare pour ce type de produit. Alors qu’historiquement, elles s’approvisionnaient davantage en avants, elles s’orientent désormais vers des carcasses entières. Mais elles prennent aussi davantage de femelles pour proposer une viande plus rouge et moins maigre. En restauration commerciale, la demande est orientée vers des pièces à griller et de la viande hachée. La carcasse ne doit pas être trop lourde et la viande de JB, peu grasse, est mieux adaptée en pièces à bouillir. En restauration collective, des petites portions sont recherchées et le prix reste un critère d’arbitrage central.
Le JB redevenu compétitif La conjoncture sur les JB est aujourd’hui inattendue. Ces produits sont redevenus compétitifs et les hausses peuvent être répercutées à nos clients car les cours européens se rejoignent aujourd’hui. La hausse des coûts des matières premières et de l’énergie est toutefois à prendre en compte. Pour le JB, il est important de continuer à se concentrer sur les marchés allemand, italien et grec qui permettent un équilibre pour la valorisation des carcasses. Le marché chinois est par contre extrêmement opportuniste, les prix peuvent y passer du simple au double. La pénurie d’animaux va apparemment durer. Il faut désormais trouver comment convaincre les éleveurs français de refaire du JB. Yann Denou, Directeur commercial Elivia Services