Miguel Neau explique comment réaliser soi-même son engrais organique, utilisable aussi bien en maraîchage qu’en grandes cultures.
Direction les sous-bois de la ferme Ti Mamm Douar à Laz pour prélever la litière en décomposition, les feuilles collées entre elles et les petits morceaux de bois colonisés par des filaments blancs de champignons. Miguel Neau, botaniste et écologue, apprend à un groupe d’agriculteurs à fabriquer ce qu’il nomme « un engrais organique sur base végétale ». La litière de forêt contient « des microbes en veille. Ils sont non exogènes. L’idée est de trouver le levain local pour améliorer la décomposition de vos fumiers, stimuler de façon biologique les sols et les plantes ». Cette technique ancienne utilisée à Cuba ou au Japon se focalise autour de la fermentation, réalisée sous 2 phases, solide puis liquide.
Sucre, son et petit lait
Quand la quinzaine de kilogrammes de litière est récoltée de préférence sous des essences de feuillus, 16 kg de petit son de blé sont incorporés. « Ce son apporte de l’acide silicique et des minéraux. Les plantes dépensent de l’énergie pour nourrir les micro-organismes et pour acidifier le milieu autour de leurs racines ». L’acide silicique viendra donc aider le végétal dans cette baisse de pH de la rhizosphère. 1,5 kg de sucre et 4 L de petit-lait chauffé à 25 °C sont ajoutés à la préparation. « Il ne faut pas aller au-delà de cette température pour ne pas provoquer de choc thermique. Le petit-lait apporte des ferments lactiques ». Une fois tous ces ingrédients mélangés, la masse est humidifiée avec une eau non chlorée jusqu’à passer le test du poing. « Le mélange doit coller, on doit sentir un léger suintement entre les doigts ». L’ensemble est enfin stocké dans un fût hermétique, en veillant à bien le tasser. Un bouchon de sable avec une bâche vient terminer l’opération de la phase solide. Le contenu du fût devient stable au bout de 3 à 4 semaines, comme une choucroute. Durant les 7 premiers jours, la température ambiante doit être d’au moins 23 °C.
[caption id= »attachment_65484″ align= »aligncenter » width= »720″] Pour une bonne fermentation en phase solide,
le tassement dans le fût est très important.[/caption]
En phase liquide
Au bout de cette période et à l’ouverture du récipient, le pH « doit être à un maximum de 4, l’odeur doit être agréable ». Vient alors la préparation de la phase liquide, qui consiste à chauffer 30 L d’eau additionnée d’1 kg de sucre et de 4 L de petit-lait. Ce liquide chauffé à 30 °C reçoit 3 kg de litière fermentée solide. L’ensemble est remis en bidon, puis entreposé à 25 °C pendant 2 jours, afin de lancer la fermentation. Au bout d’une semaine, le liquide filtré peut être épandu sur les sols ou sur les plantes. Ce LiFoFer (pour litière forestière fermentée) est dilué avant utilisation, « de 2 à 10 fois en maraîchage, de 1 à 5 fois en grandes cultures. Pour les légumes, il faut compter 2 à 3 arrosages à 40 L/ha au printemps ; sur céréales, 15 à 25 L/ha sont apportés soit après semis, soit au stade montaison ». LiFoFer peut enfin être utilisé en bain de semence, 1 heure avant le semis.