Si le phénomène en Bretagne n’a pas pris l’ampleur qu’il a eu dans les Pays de la Loire rien n’est encore gagné. L’anticipation de tous les acteurs de la filière en lien avec l’administration ont permis de bien contenir le virus.
L’Influenza aviaire est un problème mondial. Ce virus est devenu hautement pathogène en mutant en Chine en 1996. Il arrive sur un territoire par la faune sauvage migratrice. Sa diffusion est liée aux mouvements plus qu’à la taille des élevages. Les conditions hivernales favorables lui permettent de survivre dans l’environnement. « C’est le canard qui entraîne l’explosion du nombre de cas sur le territoire. La durée d’incubation est d’environ 10 jours pour les palmipèdes. Sur cette durée, les animaux ne présentent aucun symptôme. Par contre, le virus se multiplie et il est excrété en quantité. Le poulet et la dinde sont plus sensibles et les lots infectés excrètent très peu le virus car ils meurent en 3-4 jours. Cette année cette souche H5N1 hautement pathogène est très aéroportée. Le virus passe donc d’un élevage à l’autre même lorsque les règles de biosécurité sont scrupuleusement respectées », explique Gwenn Guillou, conseillère avicole à la Chambre d’agriculture lors d’une réunion d’information à destination des éleveurs le 14 avril à Saint-Ségal (29).
13 millions de volailles abattues
En France, depuis le mois de novembre 2021, 13 millions de volailles ont été abattues. À date du 12 avril, ce sont 1 265 foyers en élevage, 45 cas dans la faune sauvage et 25 cas en basses-cours. Le Sud-Ouest avec 367 foyers et la région Pays de la Loire avec 820 cas sont les zones les plus touchées en France. La Vendée est le département le plus impacté avec 523 cas. D’ailleurs, le ministre de l’Agriculture a pris la décision le 22 mars de dépeupler tous les élevages de volailles de Vendée afin d’enrayer la propagation du virus. La Bretagne recense 6 cas confirmés de H5N1 HP, 3 dans le Morbihan, 2 en Ille-et-Vilaine et 1 dans le Finistère. « Sur ces élevages, comme la suspicion était forte, la décision d’abattre les lots a été prise avant même d’avoir les résultats définitifs. Immédiatement une zone de protection de 3 km et une zone de surveillance de 10 km ont été mises en place autour de ces élevages positifs au virus », indique Gwenn Guillou.
Inquiétude pour le poulet export
Le dépistage des lots de canards est devenu systématique avec analyses (écouvillons + pédichiffonnettes) à 5 semaines, 7 semaines, 9 semaines et 48 heures avant abattage. C’est ce qui a permis de découvrir l’infection du lot de Plounévézel (29) suite à un contrôle chiffonnette en fin de gavage. Les 1 050 canards étaient en début d’infection, l’excrétion du virus a été très faible dans l’environnement. La zone de protection (ZP) de 3 km comporte la commune de Plounévézel sur le Finistère et celles de Treffrin, Trébrivan et Carnoët sur les Côtes d’Armor. La zone de surveillance (ZS) qui s’étend sur 10 km regroupe 5 communes du Finistère et 9 des Côtes d’Armor. « Avec un cas confirmé dans le Finistère, l’inquiétude était de perdre l’agrément pour nos poulets destinés à l’export. Quelques pays ont décidé de fermer leurs frontières mais les principaux clients continuent d’importer du poulet finistérien », rassure Jean-Hervé Caugant, président de la Chambre d’agriculture du Finistère.
Pas d’épandage en zone réglementée
Des mesures spécifiques doivent être appliquées en ZP/ZS : déclaration des effectifs de volailles auprès de la DDPP, recensement des basses-cours par les mairies, visite sanitaire par un vétérinaire des exploitations en ZP, déclaration à la DDPP et à son vétérinaire de tout signe évocateur de l’Influenza… Sur ces zones réglementées, il est interdit d’épandre du fumier, lisier, fientes sauf si dérogation accordée par la DDPP. Elle est possible si le fumier, lisier ou fientes sont assainis (lisier stocké 60 jours en fosse géomembrane, fumier stocké sous bâche 42 jours, fientes sous bâche 60 jours). La levée des zones de restriction se fait 30 jours après le dernier cas d’Influenza identifié sur la zone. « S’il n’y a pas de nouveaux cas pour Plounévézel, cela sera le 1er mai. » Concernant l’indemnisation des éleveurs, pour les foyers dépeuplés sur ordre de l’Administration, l’interlocuteur est la DDPP et un acompte sera versé très rapidement après l’abattage du lot. Pour les éleveurs en zone réglementée qui ne peuvent pas remettre en place, l’interlocuteur est FranceAgriMer. Le dispositif devrait être sensiblement le même que l’an dernier avec un montant calculé sur la perte de marge brute en fonction des espèces.
Jean-Michel Choquet, président du Cravi Bretagne
La cellule de crise était prête avant le 1er cas breton
L’interprofession en Bretagne avait mobilisé les pouvoirs publics avant le premier cas d’Influenza afin de constituer une cellule de crise et être opérationnel le plus rapidement possible. Nous avons essayé d’apprendre de l’expérience malheureuse de nos collègues vendéens pour anticiper. Le Cravi Bretagne a proposé à la Draf qu’il n’y ait plus de mises en place de canards le temps que la situation se stabilise en Bretagne avec un accompagnement financier des éleveurs de canards ayant des bâtiments spécifiques ne pouvant accueillir d’autres espèces et un accompagnement de l’ensemble des maillons de la filière canards (accouveurs, abatteurs…). Les professionnels du Cicar ont décidé d’établir une zone pare-feu au sud d’une ligne Vannes-Ploërmel-Rennes-Châteaubourg, pour qu’il n’y ait pas de mise en place de canards sur cette zone durant un mois et qui pourrait se prolonger si besoin.