À force d’être martelées, il est des chimères qui finissent par passer pour des vérités. Ainsi en va-t-il des soi-disant 15 000 litres d’eau nécessaires pour fabriquer un kilo de steak. Rien de scientifique là-dedans. En fait, il s’agit d’une dystopie d’Internet et des réseaux sociaux ; un vrai grenouillage dans la petite mare fangeuse de la mystification. Car, sur ces 15 000 L, 95 % est de l’eau de pluie qui tombe sur les champs, rétablit l’Inrae. C’est-à-dire, qu’élevage ou pas, cette eau s’infiltre dans le sol, est consommée par les plantes ou s’évapore dans les nuages. Rien de plus, ni de moins, que le cycle naturel de l’eau en œuvre depuis 4,5 milliards d’années. L’élevage du bœuf n’est donc pas, comme prétendent certains contempteurs, la première plaie d’Égypte qui transforme l’eau du fleuve en sang. Et on peut même dire que le bœuf – la vache se transforme en bœuf dans l’assiette n’est-ce pas ? – est à certains égards un parapluie contre la 9e plaie du XXIe siècle : « Les ténèbres » du réchauffement climatique et de la perte de biodiversité. Depuis qu’il a abandonné son statut de chasseur-cueilleur, l’homme n’a en effet pas trouvé plus sobre que le bœuf pour produire de la protéine noble à partir de plantes herbacées qualifiées de frugales par des paléontologues émerveillés de découvrir comment de maigres pâtures ont été capables de produire des herbivores gigantesques de 15-20 t durant l’Oligocène. Cette même magie biologique est à l’œuvre 30 millions d’années plus tard chez le bovin capable de valoriser les terres inadaptées aux cultures grainières. Et cela sans recours à de l’énergie fossile. Tout en participant au cycle vertueux du carbone, en nourrissant de ses déjections les bousiers et autres carabes… qui régalent les oiseaux des milieux ouverts incapables de survivre sans prairie….
Effet bœuf, effet bluff