Jusque les années 50, une ferme était productrice nette d’énergie comme on dit aujourd’hui. La traction animale et le bois étaient indigènes. En fait, jusque les années 80, la consommation énergétique d’une ferme bretonne restait très modérée. Elle se limitait au tracteur, à la machine à traire, à quelques lampes chauffantes pour les porcelets. Puis l’agriculture a amorcé le virage général de la technicité gourmande en énergie. Après avoir installé le chauffage dans les porcheries et les poulaillers, on l’a étendu aux serres. Les automates de distribution d’aliment aux animaux ont été doublés, à l’autre bout de la chaîne, d’automates d’évacuation des déjections. Et puis, on hache désormais presque tous les fourrages, on les défibre, on les mélange, on multiplie les distributions jusqu’à 10 fois par jour avec les robots, etc., tout cela à grand renfort d’énergie. Admettons qu’en prenant un peu de hauteur, et en observant tout cela avec le regard de l’historien de demain, cette consommation d’énergie sans limite a quelque chose de cocasse… Mais pourquoi se serait-on privé d’utiliser cette énergie bon marché pour améliorer les conditions de travail et les rendements, maîtriser le sanitaire des bâtiments d’élevage et du coup améliorer les performances ? Le consommateur aussi a bénéficié de tout cela. Reste qu’aujourd’hui, les aviculteurs font face à des factures d’énergie multipliées par deux sans que les contrats ne soient proportionnellement revalorisés ; des serristes retardent leurs plantations de tomate au printemps pour maîtriser les factures de gaz. Dans un contexte de renchérissement de l’énergie que l’on annonce durable et d’obligation de limiter les rejets de CO2, ce modèle agricole énergivore touche à ses limites. Comme l’industrie, les services, l’agriculture va devoir se réinventer en profondeur….
Énergie