Avec des faibles besoins en eau et en azote, le tournesol plaît de plus en plus dans des bassins de production à bon ensoleillement. L’oléagineux allonge les rotations et se situe sur un marché porteur.
L’humidimètre affiche un résultat de 9 %. Pour ce dernier jour d’août, Gaëtan Hémery, entrepreneur à Bannalec (29), termine les récoltes de tournesol. Cultivée sur ses terres depuis 3 ans, cette oléagineuse ne présente que des avantages à ses yeux. Pour le Finistérien, « le bassin de production est ici, et un peu sur la région de Guidel (56). Le Centre-Finistère est moins favorable ». Le végétal à grandes fleurs jaunes aime la chaleur, l’ensoleillement, un peu d’eau. « Nous avons la chance d’avoir eu ces 3 conditions cette année, Bannalec est toujours un peu arrosé en été ». La variété précoce Sy Arco a donné des têtes régulières ; elle a été semée à une densité de 75 000 graines/ha, avec un inter-rang de 50 cm.
Petit à petit, les surfaces de la ferme ont augmenté pour atteindre désormais 75 ha. « En 2021, j’ai récolté mon tournesol au 16 octobre… » C’est donc avec un mois et demi d’avance que s’achève la moisson 2022. La culture de printemps va libérer très tôt les terres qui pourront être semées en céréale. « C’est l’idéal, il y a toujours une période de sec en fin août pour récolter, ce sont aussi des surfaces supplémentaires à faire pour les moissonneuses ». En année plus tardive, peu de crainte de germination sur pied du tournesol, comme en 2021. « C’est le cœur de tête, spongieux, qui apporte de l’humidité ». Quelques jours suffisent à sécher les capitules. À la fin août, l’entrepreneur a récolté 250 ha en comptant les surfaces emblavées par ses clients.
Fertilisation limitée
Semées avant le maïs au 16 avril, les cultures de tournesol ont été désherbées par une application en prélevée de S-métolachlore, suivie d’un binage une fois les jeunes plants sortis de terre. Mieux, la solution prélevée incorporée par un passage de herse rotative permettrait de se passer de binage. Avec cette technique, « les champs étaient très propres ».
Le danger peut venir du ciel. « Il faut faire très attention aux attaques de pigeons. Les graines ont été implantées à 2 cm de profondeur, la ligne de semis doit être bien plombée. Si la coque de la graine émerge du sol en même temps que la plantule, ce sont des attaques assurées ». La parade, peut-être fastidieuse mais efficace, a été trouvée en faisant régulièrement voler un drone au-dessus des champs fraîchement ensemencés.
« Les besoins en fertilisation du tournesol sont très faibles. Pour un objectif de 30 q de rendement, 60 uN/ha suffisent. C’est une culture qui profite très bien des arrière-effets des épandages organiques », précise Thomas Méar, ingénieur régional Bretagne et Pays-de-la-Loire pour Terres Inovia. « Vu le prix actuel des engrais, c’est avantageux », conçoit Gaëtan Hémery. Et l’entrepreneur de chiffrer ses charges. « Il faut compter 100 €/ha de semence ». En ajoutant le travail du sol et le semis, le désherbage (chimique et mécanique) et la récolte, les charges s’élèvent autour des 800 €/ha. Le rendement moyen est de 30 q/ha, valorisé à 700 € la tonne. Le produit à l’hectare est donc de 2 100 €. Le besoin en protection fongicide est nul, les attaques de pucerons de l’année n’ont pas demandé de protection spécifique.
En cultivant du tournesol, Gaëtan Hémery a voulu allonger ses rotations, et surtout « trouver une alternance à des semis de blé après maïs. Après la récolte, je vais réaliser un passage de rouleau (type Faca) puis de déchaumeur pour que les cannes se dégradent rapidement ».
Une dose pour 2 ha
Les trémies des moissonneuses ont déversé leur contenu directement dans des bennes, au champ. Ensuite, direction Quimperlé (29), site dédié à la collecte de ces graines noires pour Eureden. « Il n’y a qu’un seul et unique débouché : la trituration à l’usine de Cargill de Saint-Nazaire (44). Le marché est en demande de tournesol français », note Alexandre Clech, commercial en métier du grain pour la coopérative. Le marché est en pleine explosion depuis 3 à 4 ans. Le conflit sur les terres ukrainiennes dope la demande, ce pays étant jusqu’à présent le 1er producteur mondial. Les variétés les plus précoces sont les mieux adaptées au contexte pédoclimatique breton, « nous avons commercialisé 800 doses de semence en 2022 sur la Bretagne et une partie de la Loire-Atlantique, soit l’équivalent de 1 600 ha ». L’huile extraite puis raffinée alimente le marché de l’alimentation humaine. Les tourteaux riches en protéines ont pour destination l’alimentation animale.
Diversifier son assolement Les cultures de printemps comme le maïs grain ou les céréales de printemps ont une variabilité interannuelle de rendement relativement faible, comparativement à leur forte volatilité de prix. En tournesol, on a encore du mal à estimer la variabilité des volumes récoltés suivant les conditions techniques et climatiques. En revanche les marchés semblent porteurs, tant pour l’alimentation que pour l’industrie. La culture nécessite moins d’azote qu’un maïs. Semer du tournesol est aussi un moyen d’introduire une nouvelle espèce dans sa rotation, ce qui est bénéfique sur le plan agronomique et répond aux exigences de diversité de la Pac. Geneviève De Lansalut, Pôle études et perspectives à Cerfrance Bretagne