Le scénario du changement climatique est écrit jusqu’en 2050, selon Serge Zaka, agro-climatologue. Il faudra s’adapter pour conserver les rendements, en jouant sur plusieurs leviers.
En Bretagne, l’année atypique 2022 a été bénéfique au blé et à l’orge d’hiver, au triticale et surtout au colza (+ 15 % de rendement). Les fourrages et les carottes ont souffert (25 % de moins environ). La pomme de terre aussi a vu ses rendements fondre de 11 %. Dans la région Midi-Pyrénées, seul le colza a profité de la chaleur et résisté à la sécheresse. Toutes les autres cultures ont souffert ; le maïs non irrigué (-53 %), mais aussi le sorgho, le tournesol, les cultures d’hiver et même le maïs irrigué (- 12 %). « En 2050, 2022 sera une année normale », prédit Serge Zaka, agro-climatologue, intervenant à l’assemblée générale de JA 56, à Berric. Quelle que soit l’augmentation de température à la fin du siècle (1,5 °C, 2 °C ou 4 °C), le scénario jusqu’à 2050 est connu.
Risque d’échaudage
À Lorient, la pluviométrie devrait augmenter de 15 % mais les périodes de sécheresse seront stables. « Comme partout en France, les pluies seront plus intenses en hiver et plus faibles en été. L’évapotranspiration augmentera, même en hiver. Vannes connaîtra les températures de Toulouse actuellement et Brest ne craindra plus jamais le gel ». Le rendement du blé, qui a augmenté régulièrement depuis quelques décennies se stabilisera dans le nord du pays et chutera de près de 15 % dans le Sud. « Le déficit hydrique en période de montaison et l’échaudage pendant le remplissage des grains seront préjudiciables malgré les progrès techniques ». Pour les mêmes raisons, l’augmentation des rendements de la culture de maïs s’essoufflera, voire diminuera dans les zones les moins profondes de Bretagne. La végétalisation de la région pourrait également lui être préjudiciable (moins de prairies et d’engrais organiques). Le rendement des pois protéagineux diminuera partout en France ; le colza s’en sortira dans le Nord et stabilisera sa production dans le Sud. « Son système racinaire lui permet d’aller chercher de l’eau ».
Reprise automnale des prairies
Les prairies seront fortement impactées. « La croissance sera plus précoce, se traduisant par une pousse supérieure de 30 % au printemps. Ensuite, jusqu’à juin, elle devrait être identique à maintenant et presque deux fois plus faible en période estivale. La reprise automnale sera difficile, avec une mort végétale possible sur certaines espèces ». Les animaux souffriront également de la chaleur. « Le nombre de jours de stress thermique pour une vache est d’une cinquantaine de jours, en moyenne actuellement, à Ploërmel. Il y aura une quinzaine de jours en plus en 2050 ». La production laitière devrait diminuer de 10 % en période estivale, selon Serge Zaka, en raison de l’inconfort et de l’augmentation des risques durant la gestation.
À la recherche de variétés résistantes
Quoi qu’il en soit, l’adaptation au changement climatique est nécessaire. De nouvelles espèces seront cultivées là où, pour des raisons climatiques, elles étaient absentes. « Il faut dès à présent construire les filières de demain (des semences à la vente) ». Les légumineuses pour l’alimentation humaine, par exemple, en Bretagne, ou encore le sorgho. « Les techniques de conservation des sols faciliteront la rétention d’eau et l’agriculture connectée apportera des solutions ». La génétique pourrait aussi faciliter l’adaptation au changement, avec des variétés plus résistantes au stress hydrique. Les nouvelles méthodes de sélection pourraient permettre d’aller plus vite, à condition d’être acceptées par la société.