Les conditions de production en 2022 ont engendré une baisse des rendements en échalote de l’ordre de 20 %. À cela il faut ajouter une baisse de la demande entraînant une diminution du prix payé au producteur, alors que les coûts de production explosent.
Depuis plusieurs années, la surface cultivée en échalote par plus de 150 exploitations est plutôt stable au sein de l’organisation Cerafel (Prince de Bretagne), autour de 1 100 ha (le Cerafel regroupe la Sica Saint-Pol-de-Léon, Maraîchers d’Armor, Terres de Saint-Malo). « Nous sommes sur un marché de niche concurrencé par l’oignon, l’échalion et depuis plusieurs années par l’échalote de semis. Mais ces produits n’ont pas les qualités gustatives de notre échalote traditionnelle », explique Adrien Corre, président de la section échalote du Cerafel et installé avec son frère Vincent sur la commune de Saint-Frégant (29) sur une exploitation légumière de 130 ha dont 30 ha sont dédiés à la culture de l’échalote.
Le mildiou a touché les variétés résistantes
En 2022, la plantation des échalotes traditionnelles, qui se fait manuellement tout comme la récolte, s’est étalée de mi-janvier à mi-mars. « À partir du mois d’avril nous avons eu une période sèche qui a pénalisé le démarrage de la culture. Ensuite, sur notre zone côtière, au mois de mai nous avons eu de nombreuses journées avec une alternance de brume de mer suivie de fortes chaleurs ce qui est propice au développement du mildiou. La maladie, dont la pression a été très forte sur toute l’Europe, s’est même développée sur des variétés résistantes ce qui a fortement impacté le rendement et la qualité », décrit Adrien Corre. Le producteur ajoute que certains traitements anti-germinatifs réalisés en fin de cycle de culture sur certaines parcelles n’ont pas été aussi efficaces qu’en saison normale ce qui a posé des problèmes de conservation sur des lots d’échalotes destinés à une commercialisation plus tardive et non conservés en frigo. « Ces conditions météo particulières ont engendré du calibre plus petit lors de la récolte. Globalement, nous avons le même nombre d’échalotes mais la différence de calibre engendre 20 % de tonnage en moins comparé à une saison normale. »
Un prix couvrant difficilement les coûts de production
La baisse de rendement laissait présager une saison sans encombre avec un prix qui aurait dû être à la hausse. Finalement la courbe des prix s’est inversée depuis décembre, les prix à date sont inférieurs de 30 % à ceux de l’an passé. Adrien Corre précise : « Avec des rendements en baisse de 20 % et des coûts de production qui ont explosé, les prix actuels de 0,80 €/kg en échalote frigo peinent à couvrir les coûts de production. Le coût de la mise en place de la culture et de la récolte a fortement grimpé car tout se fait manuellement. Le prix du paillage plastique et de certains engrais a doublé en deux ans. Pour les producteurs qui stockent en frigo, la facture d’électricité a explosé. Nous estimons que nos coûts de production ont augmenté de plus de 20 % hors stockage et électricité. » Le contexte économique et l’inflation poussent le consommateur à faire des choix et l’échalote, qui est un produit substituable par de l’oignon par exemple, en fait les frais. « Pourtant cela n’est pas très logique car l’oignon jaune en ce moment est à 1 000 €/t donc bien plus cher que l’échalote. Le problème est que le prix de l’échalote ne bouge pas dans les magasins même lorsque le prix payé au producteur est en forte baisse comme en ce moment. Le filet de 250 grammes d’échalotes est à 1,30 € en magasin, sur ce prix de vente il y a 0,20 € qui revient au producteur. » Adrien estime que le salut de la fin de saison viendra par une meilleure qualité de la marchandise stockée en frigo, un rééquilibrage de prix entre l’oignon et l’échalote car en ce moment en GMS le prix de l’échalote est plus élevé que celui de l’oignon à l’inverse du marché.
Différencier l’échalote traditionnelle de celle de semis
Les producteurs bretons sont confrontés à la concurrence de l’échalote de semis qui se développe de plus en plus en France, aux Pays-Bas, en Belgique, en Allemagne et en Italie. Ces 2 derniers pays étaient de bons clients et, depuis 3 à 5 ans, ils produisent cette échalote de semis ce qui a engendré des baisses de commandes chez nous. Ces producteurs qui étaient spécialisés sur de l’oignon ont les machines nécessaires pour semer mais aussi récolter et n’ont pas besoin d’interventions manuelles. Ils ont donc des coûts de production bien en dessous des nôtres car ici nous plantons un bulbe à la main et non une graine avec un semoir. La section nationale échalote traditionnelle est en veille sur ce sujet, mène des essais et études afin de pouvoir différencier juridiquement cette échalote de semis, apparenté à un oignon, de notre échalote traditionnelle. Pierre Gélébart, chef produit échalote du Cerafel