La bête échappe-t-elle à ses créateurs ? C’est ce que suggère l’appel de 1 300 chercheurs en intelligence artificielle (IA) qui invitent à marquer une pause dans le développement des nouvelles technologies dites « génératives » incarnées par le modèle bluffant Chat-GPT4. Selon ce collectif, ces nouveaux outils dotés de capacité de raisonnement avancé porteraient en elles le germe de certaines menaces pour l’humanité : menaces d’une intelligence artificielle capable de concurrencer celle de l’homme ; menaces sur l’emploi. Mais plus que tout, c’est l’opacité des modèles algorithmiques, comparés à des boîtes noires potentiellement manipulables par les esprits pernicieux, qui ont poussé les chercheurs à demander un moratoire.
Cette idée de marquer une pause est pourtant illusoire. Car l’intelligence artificielle est déjà infiltrée partout. Et rend de nombreux services, y compris en agriculture. C’est ce que l’on appelle l’agriculture connectée ou smart-farming qui a d’abord conquis les fermes au travers d’applications désormais courantes : guidage GPS, monitoring animal pour détecter chaleurs et vêlage des vaches. Mais, là, n’est que le balbutiement d’une technologie en devenir. Les nouvelles approches « big data » basées sur la collecte d’importantes quantités de données nécessaires à l’apprentissage automatique (machine learning, deep learning) ouvriront des perspectives autrement plus conséquentes dans l’offre de nouveaux services à l’agriculture. Pour l’agriculteur, l’un des écueils majeurs de l’omnipotence de ces techniques sera son opacité, à l’image de ce qu’il advient avec Chat-GPT. Des interférences invisibles de la part de sociétés et groupes de pression dont les intérêts ne sont pas ceux agriculteurs, pourront biaiser et orienter les décisions de l’IA. D’où, la nécessité d’autonomie intellectuelle encore plus poussée indispensable pour rester maître chez soi demain.