Après avoir travaillé plusieurs années dans une banque d’affaires à Londres, puis comme gestionnaire de fortune à Paris, Gauthier Dumas a changé d’orientation professionnelle. Ce spécialiste de la finance est désormais pépiniériste dans le Nord-Finistère où il a repris, avec sa compagne, l’entreprise de ses beaux-parents.
À le voir surveiller de près les réglages de la nouvelle unité de rempotage installée sur son exploitation, on ne l’imagine pas forcément en costume-cravate, en train de conseiller un client fortuné. Et pourtant, il y a à peine quatre ans, c’était le quotidien de Gauthier Dumas. Diplômé d’une école de commerce, spécialisé dans les métiers de la finance, rien ne prédestinait cet enfant du Sud-Est à devenir un agriculteur breton. Mais la vie est passée par là…
« En 2016, lorsque nous sommes rentrés à Paris avec Élodie après plusieurs années en tant qu’expatriés à Londres, j’ai effectué une première reconversion professionnelle. Durant trois ans, j’ai travaillé pour de grands clients fortunés, ce que l’on appelle le family office, dans le secteur financier. C’est un métier passionnant mais avec un rythme de dingue. Il était très difficile de trouver un équilibre entre le volet professionnel et la vie familiale, d’autant que nous étions devenus parents d’une petite fille en 2018 ».
À l’été 2019, le couple entame une réflexion : avenir professionnel, aspirations personnelles, cadre de vie… Au fil des discussions, une piste se dégage : pourquoi ne pas reprendre l’exploitation des parents d’Élodie, Hubert et Marie-Paule Le Nan, qui approchent de l’âge de la retraite ?
Une approche cartésienne
Avant de se décider, les deux trentenaires rencontrent d’autres producteurs de la Sica, discutent avec des agriculteurs venant de s’installer, échangent avec le centre comptable… « Nous avions une approche très cartésienne du dossier. Il était même prévu des semaines d’immersion à différentes périodes de l’année ». Mais, patatras ! Début 2020, la pandémie de Covid débarque en France avec, dans son sillage, le confinement. De quoi chambouler le quotidien familial. D’autant qu’un second enfant s’annonce. Mais, au final, cela ne fera que confirmer le couple dans son nouveau projet de vie. À l’automne, la décision est prise. Et la famille met définitivement le cap à l’Ouest pour rejoindre le Finistère. « Nous avons travaillé comme salariés en 2021, souligne Gauthier. Puis, Élodie a repris l’exploitation familiale en janvier 2022 et moi, je l’ai rejointe un an plus tard ». Entre-temps, pour se préparer à ce métier qu’il découvre, l’ex-banquier d’affaires a passé un BPREA dans le cadre de la validation des acquis de l’expérience. Et mis à profit l’expérience et le savoir-faire de son beau-père.
Une autre qualité de vie
Sans renier son passé, Gauthier savoure pleinement son quotidien. « Chaque jour, j’applique des choses apprises dans mes expériences précédentes. Avant, je faisais des choix d’investissements pour mes clients. Aujourd’hui, c’est pour notre exploitation ! Même si je travaille toujours autant, nous avons désormais une autre qualité de vie. Nous vivons avec nos filles, à la campagne, à proximité de la famille. Élodie a retrouvé plein d’amis d’enfance ».
L’EARL de Menfig, qui compte sept hectares de pépinières auxquels s’ajoutent sept hectares d’échalotes ainsi qu’un peu de céréales, emploie sept salariés à temps plein. La partie pépinière représente, à elle seule, près de 90 % du chiffre d’affaires. L’objectif des deux repreneurs est de continuer à faire grandir l’exploitation et notamment, à terme, de développer la reproduction de plants.
Avec la volonté de s’investir dès à présent dans la vie locale, Gauthier a candidaté pour intégrer le conseil d’administration local de sa banque coopérative. Les sociétaires du Crédit Mutuel de Bretagne l’ayant élu lors de l’assemblée générale, vendredi dernier, le voici désormais administrateur de la Caisse de la Baie du Kernic. Un vrai paysan breton !
Jean-Yves Nicolas
Compétence et cohérence
Gauthier et Élodie sont de vrais entrepreneurs. Vous sentez que tout est bien réfléchi et calculé avant même que le rendez-vous soit programmé avec le comptable ou le banquier. Il y a une parfaite cohérence entre les prévisionnels qu’ils établissent et les résultats enregistrés ! De par leur motivation et leurs compétences, ils ne peuvent que réussir dans leur projet de reconversion.Ludovic Laurent, responsable de clientèle agricole, pôle d’expertise CMB de Saint-Pol-de-Léon