Marché nomade veut s’adapter aux défis du circuit court

15731.hr - Illustration Marché nomade veut s’adapter aux défis du circuit court
Cette livraison à Ploeuc-sur-Lié offre une image du lien qui peut se créer entre producteur et consommateur. Chaque semaine, les clients passent commande sur ‘‘Marché Nomade’’ avant d’être livrés pour 3,50 €, quelle que soit la valeur de leur panier.  
Boostées par la crise sanitaire, les ventes en circuit court ont connu un net ralentissement en 2022. Pourtant, produire local et de qualité semble toujours répondre aux attentes d’une partie des consommateurs. Dans ce contexte, Marché Nomade, réseau de producteurs costarmoricains, tente d’asseoir son modèle sans cesser de l’interroger.

« On passe notre temps à se réinventer ! ». Estelle Laville et Morgane Le Méhauté, co-fondatrices de ‘‘Marché Nomade’’ en sont conscientes : seules les personnes convaincues acceptent de payer (un peu) plus cher pour manger bio et local. En racontant leur parcours, elles témoignent ainsi de l’énergie et de l’inventivité nécessaires pour s’adapter en permanence à l’évolution de la vente en circuit court.

Cinq jours

« On s’est rencontrées en 2019 sur un marché », se souviennent-elles. L’été suivant, Morgane organise sur sa ferme un marché fermier hebdomadaire : « On était huit producteurs avec une gamme complète, c’est comme cela que l’idée nous est venue de proposer un marché clef en main pour créer l’événement dans un bourg. On a contacté des mairies autour de Saint-Brieuc et on s’est mis à faire des marchés nocturnes, trois ou quatre par semaine. Cela commençait bien ».
Mais en mars 2020, tout s’arrête : marchés interdits ! « Pour moi, ce n’était pas dramatique, raconte Estelle, je ne perdais pas de marchandise, mais Morgane devait nourrir des poulets qu’elle ne pouvait plus vendre. Il fallait réagir. On a bricolé un fichier regroupant tout ce que le collectif pouvait proposer et on l’a fait circuler ». Tandis que les premières commandes tombent, le fichier (très partagé) arrive aussi chez Acantic, entreprise briochine spécialisée dans les paniers fermiers en ligne : « Ils nous ont proposé de créer une plate-forme numérique et de nous facturer ce service uniquement si on le gardait après le confinement… Et tout cela, en cinq jours seulement ! ».

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Morgane Le Méhauté, éleveuse de poulets, et Estelle Laville, pâtissière artisanale, ont lancé Marché Nomade en 2019. Depuis, une trentaine de producteurs, artisans et commerçants les ont rejointes.

Livraison à domicile

Une plate-forme de préparation des paniers se met alors en place et Marché Nomade investit dans du matériel de stockage. Originalité du réseau : plutôt que de demander aux clients de venir chercher leur commande, ils sont livrés à domicile. Un service facturé 3,50 €, quel que soit le panier commandé.  
Côté producteurs, les choses s’organisent aussi avec la volonté, pour élargir l’offre, de ne pas se limiter aux produits locaux. « On a rédigé une charte qui exige de produire bio ou, à défaut, d’avoir une traçabilité irréprochable. Par ailleurs, en fonction de son implication, chaque producteur doit laisser une commission sur son chiffre d’affaires (entre 2 et 20 %) pour couvrir les frais de fonctionnement ». À la fin du confinement, le réseau écoule plus d’une centaine de paniers par semaine : « Alors, on a décidé de continuer ».

Opération adaptation

Marché Nomade a créé un demi-poste salarié pour aider à préparer les paniers, gérer les commandes, permettre aux producteurs bénévoles de souffler, mais aussi, pour soutenir les ventes qui commencent à baisser, prémices de l’effet post-Covid . « On a fini par perdre la moitié des clients, mais en termes de chiffre d’affaires, on s’en sort encore parce que ceux qui sont restés ont augmenté leurs commandes  ».
Cela dit, Marché Nomade est bien à un tournant : pour continuer d’exister, il devra convaincre de nouveaux clients. « En attendant, pour s’adapter à la baisse, on a réduit la voilure en supprimant le poste salarié, en recentrant notre secteur de livraison pour limiter les frais et en resserrant la gamme sur ce qui se vend le mieux ».
Autre levier actionné par le réseau : la communication. Un nouveau site plus attractif met en avant les points forts de la démarche et une gazette périodique est distribuée à chaque client pour maintenir le lien avec les producteurs et valoriser l’éthique ‘‘Marché Nomade’’. Les articles brossent autant le portrait d’un producteur ou d’un client qu’ils parlent de la réduction des emballages, du recyclage, de la labellisation bio, du jardinage, voire des pièges à frelons asiatiques…
« On traverse une période difficile d’inflation où chacun fait attention à son budget, concluent-elles, mais on reste confiantes, sans douter de l’évolution à terme des modes de consommation ».

Pierre-Yves Jouyaux

Le prix du lien

Cliente de la première heure, Marjorie Ferré témoigne de son engagement à faire ses courses au ‘‘Marché Nomade’’. « On est une famille de quatre. J’ai connu le collectif lors des marchés organisés au bourg de Plœuc, juste avant le confinement. Quand tout s’est arrêté, cela nous a intéressés de pouvoir commander et d’être livrés à domicile. On apprécie la diversité des produits vendus et la capacité des producteurs à proposer des nouveautés, par exemple les plats à base de cuisine végétale… On a essayé, c’est très bon !  Et puis, il y a le lien avec notre livreuse, Estelle, qui permet d’avoir des nouvelles, de garder le contact. Le seul bémol, c’est quand un producteur quitte le réseau… Il faut attendre qu’il soit remplacé !  Ce qui retient les gens d’essayer Marché Nomade ? Peut-être la peur de prix trop élevés. Pourtant ils sont raisonnables. Pour comprendre un tarif, c’est plus facile si on connaît le producteur qui est derrière et l’effort que cela lui demande. C’est pour cela qu’il est important d’échanger avec Estelle : le fait de mieux comprendre le sens du travail effectué change la dimension du prix ».   

Contact : marchenomade.fr
Estelle Laville, 06 26 91 69 56

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