Pour choisir leur plante-hôte et sucer la sève jusqu’à plus soif, les pucerons ne font pas de distinction entre plante cultivée et mauvaise herbe. Ainsi sont-ils nombreux sur les rumex en ce mois de juin. Ces pucerons qui affaiblissent les rumex seraient donc de précieux alliés du paysan ? Et par conséquent, les coccinelles qui se régalent de ces pucerons affairés à détruire le rumex seraient les ennemies de l’agriculteur puisqu’elles viennent entraver la tâche des pucerons destructeurs ? C’est ce que démontrerait sans difficulté un chercheur à l’aune d’une vie entière passée à travailler sous le prisme de son sujet de prédilection : l’élimination du rumex par les insectes parasites. Fausse conclusion rétorquerait l’agriculteur pétri de « bon sens paysan ». Car en fin observateur, il sait qu’une escadrille de pucerons met rarement un rumex à terre. Il sait aussi que les coccinelles sont de précieux auxiliaires des cultures. Et que leur présence sur les mauvaises herbes au printemps leur permet de patienter et de se multiplier en attendant l’été pour passer à l’attaque sur les cultures.
Cette « approche systémique » est actuellement réenchantée
C’est cette « approche systémique » – comme on dit pompeusement aujourd’hui – , qui est constitutive du bon sens du paysan. Il est curieux de constater que cette « approche systémique », par nature transversale, est actuellement réenchantée dans tous les domaines après des décennies de segmentation des connaissances. On ne peut que se féliciter de ce revirement. Car l’interconnaissance est l’inverse du cloisonnement à outrance qui est, par exemple, à l’origine de tant de réglementations iniques ou de formulaires absurdes. Avec l’approche systémique, c’est promis vous n’aurez plus besoin de choisir arbitrairement entre tuer les coccinelles ou laisser proliférer les rumex.