La forge de Lanorven revit

« Sauver le patrimoine est le devoir de chacun ». Fort de cette maxime, l’association Santez Anna Lanorven a redonné vie au village éponyme de Plabennec (29). Autrefois cœur de la vie d’un village, la forge a retrouvé sa flamme.

16399.hr - Illustration La forge de Lanorven revit
Les membres de l’association ont collecté de nombreux outils anciens.

Pour l’occasion, Daniel Abéguilé a revêtu son épaisse tenue de forgeron bleu de Prusse. Le charbon posé en pyramide au centre d’un des foyers de la double-forge ne tarde pas à rougir du feu ardent attisé par la souf-
flerie électrique. Le gros soufflet de cuir suspendu au plafond, que jadis les enfants faisaient respirer en tirant sur une chaîne, n’a pas été remis en fonctionnement. « Il fuit », argue le forgeron bénévole, reconnaissant que c’est très bien ainsi. Car il était pénible de faire fonctionner ce poumon même si les enfants affichaient une certaine fierté quand on leur confiait la tâche.

Donner corps à son art

Daniel Abéguillé, ancien ferronnier d’art, a l’œil de l’expert du métal. Il sait quand retirer du feu le fer rougi à vif pour le battre sous son lourd marteau. Au premier coup sur l’enclume, ses acolytes de l’association venus l’encourager arrêtent de papoter. Dans un balancé souple, aussi ample que précis, le forgeron dompte peu à peu le fer soumis. Mais voilà qu’il reprend une teinte grise et se raidit. Le signal pour Daniel Abéguillé qu’il est temps de le remettre au feu. Quelques courtes minutes dans la braise à 1 500 °C suffisent à lui redonner sa couleur incandescente et sa malléabilité. Les coups s’abattent à nouveau sur la pièce métallique qui amorce désormais un enroulement en volute. Dans la main du maître du feu et du fer, le marteau et l’enclume sont au forgeron ce que le cahier et la plume sont à l’écrivain : les outils pour donner corps à son art.

Le marteau et l’enclume sont au forgeron ce que le cahier et la plume sont à l’écrivain

Depuis son inauguration en septembre 2022, la forge de Lanorven est devenue le cœur de ce village rural sorti progressivement de sa décrépitude. Il y a eu d’abord la résurrection de la chapelle consacrée à Sainte-Anne et Saint-Cadou que les bénévoles de l’association ont restauré avec entrain 10 ans durant. En 2005, ce petit édifice a même retrouvé sa cloche datant de 1833. Elle tintinnabule désormais chaque mois de juillet à l’occasion du pardon annuel qui donne lieu à une procession avec bannière pour la bénédiction de l’eau de la fontaine située en contrebas du village, à proximité immédiate d’un lavoir qui a également été restauré.

Six ans de travaux bénévoles

C’est en 2016 que s’ouvre une nouvelle étape avec un chantier colossal : faire renaître la forge du village de ses cendres. Les photos de l’état initial des lieux et du déroulement des travaux témoignent du délabrement du bâti avant les travaux. Qu’importe, pendant plusieurs années, les bénévoles vont se relayer pour restaurer cette construction qui, aujourd’hui, a fort belle allure. 

Yves Dolou, vice-président, raconte : « La forge appartenait à la famille Kerzil. Elle devait être cédée à Louis Péron, fils de Françoise Kerzil et de René Péron. Mais le destin en a décidé autrement puisque Louis Péron est mort en 1958 en Algérie ». La forge ferme alors définitivement ses portes au début des années 60. En 2016, la commune devient propriétaire du site et les travaux de remise en état peuvent commencer. Murs, charpente, toiture, ouvertures, sol : tout est repris, consolidé voire refait à neuf. Quant à la forge, elle a été reconstituée de fond en comble dans la cour adjacente au bâtiment principal où elle se trouvait jadis. Le résultat est bluffant : l’ancien – à savoir les outils de la forge d’antan – côtoie le moderne – l’éclairage naturel est assuré par de larges baies vitrées enchâssées dans des structures métalliques faites sur-mesure par Daniel Abéguilé. « Jusqu’aux écrous et boulons qui ont été fabriqués sur place », raconte un membre de l’association admiratif devant ce travail d’orfèvre.

Susciter de jeunes passions

Pour l’association Santez Anna Lanorven, l’enjeu consiste à présent à faire vivre ce musée rural. Notamment en faisant venir les enfants et adolescents pour leur faire découvrir le patrimoine local, les sensibiliser au métier de forgeron, voire les initier. Et, pourquoi pas faire naître chez certains jeunes, la passion du travail du fer et de la forge. En d’autres termes, faire s’exprimer l’or qui dort (peut-être) dans leurs mains.

Animations été 2023

  • Du 15 juillet au 15 août : exposition ACBL, Art dans les chapelles du Léon, avec Nicole Ryan (mélange de broderies et peintures très colorées).
  • Dimanche 30 juillet : pardon Sainte-Anne, messe à l’église paroissiale.
  • Jeudi 27 juillet et jeudi 10 août, de 14 h à 17 h, ouverture du musée de la forge avec démonstrations (sur inscription à l’Office culturel des Abers.

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