Pour retracer 75 ans de travail dans le secteur de la génétique et du contrôle de performance, Innoval a sorti un ouvrage de plus d’une centaine de pages. Il rassemble les témoignages d’éleveuses et d’éleveurs mais aussi de salariés exerçant différentes fonctions au sein du groupe : consultante zootechnique, pédicure bovin, secrétaire d’élevage, inséminateur, responsable de taurellerie… « Plutôt que de faire une rétrospective, nous avions envie de donner la parole à celles et ceux qui font l’élevage aujourd’hui », explique Patrice Guiguian, président du groupe coopératif. « Mais aussi de se tourner vers demain pour orienter nos décisions dans un monde qui bouge beaucoup et très vite : baisse du nombre d’exploitations et des cheptels, changement climatique important, attentes sociétales fortes qu’il faut honorer… »
Besoin de déconnecter
Innoval a ainsi collecté les réponses de plus de 1 095 éleveurs de bovins (lait et viande) – « un panel assez large pour être représentatif de l’élevage français » – sur leur vision du métier à horizon 2035. Les résultats sont riches d’enseignements présentés sous forme de textes et de graphiques simples à lire. Par exemple, si 60 % des éleveurs sont optimistes quant à l’avenir de leur métier, c’est plus que dans beaucoup d’autres catégories socioprofessionnelles, une érosion est notée en fonction de l’âge. « Les trois principales préoccupations qui ressortent pour l’avenir du métier d’éleveur sont le prix du lait et la pénurie de main-d’œuvre puis la lourdeur des tâches administratives. » L’étude montre que les interrogés sont avant tout à la recherche d’équilibre de vie : 95 % accordent de l’importance au quotidien à rendre le métier moins physique, 81 % à se dégager du temps pour eux (en particulier chez les moins de 40 ans) et 71 % à déconnecter, à alléger la charge mentale.
Remplir sa stabulation, pas plus
Mais surtout, les chiffres montrent une vraie résistance psychologique à l’augmentation de la taille des cheptels : dans les 5 à 10 ans, 59 % des éleveurs envisagent de maintenir leur cheptel, 23 % d’abandonner (arrêt de l’élevage ou retraite), 10 % de réduire et seulement 8 % d’augmenter l’effectif bovin. « À la sortie des quotas, il y a moins de 10 ans, tout le monde disait que la Bretagne allait produire plus avec des exploitations plus grandes. On se rend compte que les troupeaux ne progressent plus. Chacun veut se contenter de remplir sa stabulation et de livrer sa référence tout en cherchant un meilleur équilibre vie professionnelle – vie familiale », termine Patrice Guiguian
Diminution programmée du cheptel
Innoval prévoit une large diffusion de son ouvrage vers ses 400 élus de territoires mais aussi vers les écoles, les responsables d’OPA et les politiques. « Alors que la Cour des comptes demande de réduire le cheptel, nos travaux montrent qu’il va diminuer naturellement et rapidement. Les industriels ont des questions à se poser quant à leur approvisionnement et les dirigeants politiques doivent rapidement s’interroger sur la capacité future de la ferme France à nourrir la population », observe Patrice Guiguian.